Surendettement : les facteurs qui fragilisent les ménages

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L’étude des parcours menant au surendettement a été réalisée pour la Banque de France dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, adopté en janvier 2013.
La Banque de France n’a pas réalisée de nouvelle enquête sur ce thème depuis cette étude menée en 2014.

La Banque de France a publié une étude des parcours menant au surendettement. Une meilleure connaissance des facteurs de fragilité et des processus menant au surendettement devrait permettre de renforcer les actions de prévention.

Le caractère multi-causal du parcours menant au surendettement

Globalement, les difficultés financières rencontrées par les personnes surendettées sont assez récentes (moins d’un an avant de saisir une commission de surendettement pour 41 % des cas). Ces difficultés sont la conséquence d’une succession de trois événements imprévisibles en moyenne (perte d’emploi, divorce ou décès du conjoint, maladie ou accident), ayant pour conséquence une baisse des revenus et/ou une hausse des charges. Et ces accidents de vie se produisent dans un contexte de budget contraint : gestion des dépenses non maîtrisée et recours accru au crédit pour faire face au déséquilibre du budget, qui contribuent à précipiter la dégradation de situations initiales fragiles.

Cinq parcours de dégradation et de fragilisation

Les parcours de surendettes

Le profil « Entraide générationnelle »

Ce profil concerne plus particulièrement les personnes âgées de 65 ans et plus. Leur situation est fragilisée en raison d’une aide financière apportée à un membre de leur famille, en recourant au crédit après avoir épuisé leur épargne.

Le profil « Recours banalisé au crédit »

Les situations personnelles et professionnelles de ces personnes surendettées sont relativement stables. Mais les différentes étapes de la vie ont mené à une accumulation des dépenses, entraînant une accumulation des crédits. Et les imprévus sont insuffisamment anticipés (ils ne sont que 39 % à déclarer mettre de l’argent de côté dès que possible pour faire face aux imprévus).

Le profil « Budget contraint »

Ce profil est caractérisé par des situations de travail précaire ou d’inactivité, des difficultés financières récurrentes. Ces personnes s’impliquent moins dans la gestion de leur budget (66 % ne connaissent par le montant mensuel des revenus et des dépenses du foyer). Et ils réalisent ponctuellement des dépenses non maîtrisées : 28 % ont profité d’une rentrée d’argent pour faire des achats « plaisir » et 13 % continuent à faire des dépenses « plaisir » (vacances, loisirs, jeux d’argent…) malgré leurs difficultés financières.

Le profil « Perte ou dégradation d’emploi »

Les personnes de ce segment sont fortement Impliqués dans la gestion de leur budget (84 % connaissent le montant des revenus et dépenses du foyer chaque mois et 92 % consultent leur compte bancaire au moins une fois par semaine). Mais la gestion du budget n’est pas suffisante pour absorber l’impact des difficultés rencontrées suite à la perte ou à la modification des caractéristiques de leur emploi.

Le profil « Evénements de vie conséquents »

Ce profil, le plus important de l’échantillon (41 %), concerne des parcours moins caractérisables que les précédents. Ces personnes ont subi des événements personnels ou professionnels importants, ayant entraîné une diminution des revenus (perte d’emploi, séparation, divorce) et une augmentation des dépenses importantes.

Face à la dégradation de leur situation, deux attitudes distinctes sont constatées : 23 % des personnes de ce profil ont une gestion budgétaire inadaptée et recherchent des aides extérieures et 18 % tentent de rééquilibrer leur budget pour faire face aux nouvelles contraintes financières.

L’éducation budgétaire pour faire face à des difficultés temporaires

L’étude note que « l’éducation budgétaire et les comportements de gestion des ressources et dépenses des ménages constituent, à situations comparables, des facteurs de différenciation marqués entre les personnes surendettées et celles de l’échantillon miroir ».

En effet, malgré des difficultés financières récentes, les personnes constituant l’échantillon miroir semblent mieux protégées du risque du surendettement grâce à une plus grande implication dans le suivi de leur budget et par la constitution d’une épargne de précaution leur permettant de faire face à des difficultés temporaires. Sauf en cas de perte ou de dégradation de l’emploi, le choc budgétaire étant alors trop important pour être absorbé.

Dans les pistes de prévention énoncées par l’étude, il est préconisé de « développer l’éducation budgétaire en général, et notamment à l’école, ainsi qu’à destination des publics fragiles et de leurs accompagnants (travailleurs sociaux…) ». Ce qui correspond aux recommandations émises par le groupe de travail confié au président du CCSF sur la définition d’une stratégie nationale en matière d’éducation budgétaire.

L’usage inadapté des crédits peut mener au surendettement

Le nombre de crédits détenus n’est pas déterminant dans un parcours de surendettement. Car les personnes surendettées et celles de l’échantillon « miroir » détiennent un nombre de crédits assez similaire (respectivement 4,1 et 3,4).

En revanche, l’usage du crédit diffère. En l’absence d’épargne de précaution, les personnes surendettées recourent au crédit comme un substitut de revenus alors que les personnes de l’échantillon miroir font un usage plus adapté du crédit. La gestion des crédits renouvelables marque bien cette différenciation. Les personnes surendettées souscrivent ces crédits moins souvent auprès de leur banque (43 % de l’échantillon) que les personnes appartenant à l’échantillon miroir (68 %). Mais elles utilisent plus fréquemment et plus largement le crédit renouvelable que les personnes de l’échantillon témoin. 27 % des surendettés utilisent leurs crédits renouvelables tous les mois (contre 18 % pour l’échantillon miroir) et 55 % tous les trois mois (contre 34 % pour l’échantillon miroir).

Les surendettés utilisent plus fréquemment leurs crédits renouvelables (63 %), pour réaliser des achats lorsque le solde de leur compte en banque est insuffisant. Elles financent ainsi les courses d’alimentation (66 %), le paiement des charges courantes (51 %), le remboursement d’un autre crédit (39 %) et le règlement des dépenses d’habillement (28 %). Alors que les personnes constituant l’échantillon miroir ont recours au crédit renouvelable principalement (51 %) pour faire face à des imprévus.