Les robots vont-ils nous voler nos emplois ?

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Comme au XIXe siècle, la crainte d’un grand remplacement du travail humain par des machines refait surface avec la révolution numérique. 

Alors que des études concluent sur la disparition de 50 % de nos emplois, France Stratégie tempère ces prévisions. Si l’effet de « destruction » des innovations est indéniable, celles-ci sont aussi « créatrices » de nouveaux emplois. En modifiant l’organisation du travail, les robots orientent les salariés vers des tâches nécessitant davantage d’interactivité et d’agilité.

Le débat sur l’automatisation du travail a connu un regain d’intérêt avec la publication en 2013 d’une étude réalisée par Carl Benedikt Frey et Michael Osborne. En pleine crise de la dette souveraine en Europe, avec des taux de chômage très élevé et le spectre de la stagnation séculaire qui hantait les économies du monde développé l’étude concluait que 47 % des emplois aux Etats-Unis et 35 % au Royaume-Uni présentaient un risque élevé d’être automatisés dans les 10 à 20 prochaines années. En transposant leurs calculs à d’autres pays, d’autres études arrivaient à un taux de 42 % pour la France, 49 % au Japon et 54 % au sein de l’Union Européenne.

Les robots vont ils nous voler nos emplois

Robots : une profession ne se résume pas à une tâche

Une étude de l’OCDE de 2016 menée par Mélanie Arntz montre les limites à raisonner par profession et non par tâches réalisées. En effet, dans une même profession, si des tâches sont automatisables, d’autres ne le sont pas comme travailler fréquemment en équipe ou être en relation avec des clients. Leur approche par tâche conclut alors que « seulement » 9 % des emplois aux Etats–Unis ont un risque supérieur à 70 % d’être automatisés. Cette proposition descend aussi à 10 % au Royaume-Uni, 9 % en France et 7 % au Japon.

Dans un article « Why there are still so many jobs ? » publié en 2015, David Autor souligne ainsi que l’homme dispose encore d’un avantage comparatif sur la machine quand il s’agit de rentrer en interaction sociale, de s’adapter, d’être flexible et de résoudre des problèmes. Ainsi, France Stratégie, en s’appuyant sur des enquêtes de l’INSEE et la DARES, a répertorié les emplois nécessitant une réponse immédiate à la demande d’un client, ce qui permet d’évaluer l’adaptabilité et l’interaction sociale, et ceux où les salariés doivent appliquer strictement une consigne sans contact avec un public. Conclusion, 15 % des emplois seraient alors menacés d’automatisation. Mais ce qui ressort également c’est que les emplois peu automatisables ont augmenté de 33 % depuis 1998.

Le rapport sur l’avenir du travail, publié en 2018 par le World Economic Forum montrait pourtant que malgré une augmentation des heures de travail effectués par les robots, l’avenir n’est pas sombre. Bien que 75 millions d’emplois pourraient être déplacés par la robotisation d’ici 2022 (principalement dans les secteurs de la gestion administrative et de la comptabilité), 133 millions de nouveaux emplois seront également créés dans les secteurs de la nouvelle économie (analyse de données, intelligence artificielle, Big Data etc). Alors que certains emplois deviennent redondants, les compétences humaines et sociales seront de plus en plus recherchées.

Transformation des métiers

France Stratégie mesure ainsi qu’entre 2005 et 2013, avec une économie davantage tournée vers les services et le recentrage des tâches des salariés sur celles qui sont les moins automatisables, les emplois peu automatisables ont progressé de 1,13 million tandis que 530 000 emplois automatisables ont été détruits. Il y a donc un phénomène d’adaptation continuelle du contenu des emplois en même temps que l’évolution technologique.

Par ailleurs, si les nouvelles technologies détruisent des emplois, elles en créent aussi dans la conception, le déploiement et la nécessité de répondre à de nouveaux besoins. Ainsi, le nombre d’ingénieurs informatiques et télécoms n’a cessé d’augmenter depuis 1983, là où les effectifs des secrétaires reculent.

Effectifs de secretaires et d ingenieurs

Enfin, l’automatisation génère des gains de productivité qui peuvent se traduire par des baisses de prix sur les produits, des hausses de salaire ou des profits qui viendront alimenter la consommation et les investissements.

Il reste aux pouvoirs publics à accompagner ces transitions par des formations et des protections sociales adaptées à ces évolutions. Là aussi, les solutions ne nous seront pas fournies par des robots !

Perte d’emplois, s’agit-il donc d’une peur infondée ?

Une décennie après la crise, les chiffres d’emploi battent des records dans de nombreux pays, dont les Etats Unis, le Japon, le Royaume-Uni et l’Allemagne, où le taux de chômage tombe à des niveaux historiquement bas, proche de la période dite des « Trente Glorieuses », période de redressement économique qui a suivi la fin de la seconde guerre mondiale.

Selon un nouveau rapport de l’Organisation Internationale du Travail, le taux de chômage mondial a chuté à 5 % en 2018, son plus bas niveau depuis la crise économique mondiale de 2008. Environ 172 millions de personnes dans le monde étaient au chômage en 2018, 2 millions de moins que l’année précédente.

Taux de chômage harmonisé OCDE

Malgré l’optimisme apparent, une étude de PwC sur l’impact de l’automatisation parue en 2018 alerte des conséquences. Selon le rapport, ce processus d’automatisation serait divisé en trois « vagues » ayant un impact grandissant sur le marché du travail au cours des prochaines décennies.

 

 

 

1-Vague des algorithmes

(Jusqu’au début des années 2020)

Automatisation des processus simples, tels que les calculs et l’analyse de données

Emplois dans le secteur financier, des assurances et de la communication

(5 % des emplois concernés)

2-Vague de l’accélération

(Jusqu’à la fin des années 2020)

Interaction dynamique avec les nouvelles technologies menant à l’automatisation dans le domaine de l’administratif et dans les prises de décision

Touchera les emplois de la première vague plus les emplois dans les secteurs administratif et manufacturier

(15 % des emplois concernés)

 

3-Vague de l’autonomie

(Années 2030)

Automatisation du travail manuel et application dans la résolution de problèmes dans des situations dynamiques

En plus des emplois des deux premières vagues, les secteurs de la construction, du transport et de la logistique seront également concernés

 (30 % des emplois concernés)

Source : Impact of automation on jobs, PwC 2018

Ce serait donc à partir de la prochaine décennie que l’on pourra constater une perte nette d’emplois dans ces secteurs. La question se pose toujours de savoir si les nouveaux emplois seront capables de compenser les pertes liées à l’automatisation. Pour de nombreux experts, le progrès technologique dans des secteurs clés pour l’innovation tels que l’intelligence artificielle et la robotisation, entrainera une transformation structurelle dans l’économie et la société comparable seulement aux effets de la révolution numérique.

    1 commentaire sur “Les robots vont-ils nous voler nos emplois ?”
    1. Les métiers qui passent au numérique sont détruits, car il vous faudra être doué dans la programmation de codes, la programmation de logiciels, ce qui dénature totalement les compétences des métiers ; et ceux qui ne le peuvent iront au SOUS-SOL de l’ASCENSEUR SOCIAL.
      Mais comme on nous fait la promotion de la modernité et du « progrès », on cherche à nous vendre toujours plus d’ordinateurs, de robots ou d’IA. OUI, plein de métiers sont littéralement avalés par le numérique et la robotisation. Pour un employeur, un industriel, c’est le coût de production qui devient bien moins onéreux avec cette automatisation forcée, terminé les bulletins de salaire, plus qu’EDF à payer.
      Parole d’expérimenté.

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