Une institution souvent critiquée pour ses préconisations de politique économique

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Le FMI, de par ses statuts qui exigent que l’octroi d’un prêt soit conditionné à la mise en œuvre de programmes d’ajustement économiques, est considéré par beaucoup comme une institution internationale exerçant un pouvoir d’ingérence excessif à l’égard des pays qui font appel à lui. 

Certains estiment qu’il joue en quelque sorte un rôle de « pompier pyromane » dont les interventions peuvent à la fois inquiéter les investisseurs internationaux au sujet du pays bénéficiaire, et donc les faire se détourner de ce pays, mais aussi provoquer l’excès inverse, les investisseurs pouvant être incités à prendre trop de risques sachant que le FMI interviendra si un défaut de paiement du pays a lieu.

Préconisations de politique économique inadaptées pour les pays en développement

De fréquentes critiques adressées au FMI considèrent que ses interventions dans les pays en développement ont aggravé la pauvreté et les dettes des pays aidés en supprimant ou diminuant la capacité d’intervention de ces États.

Leur argument principal se base sur le fait que le FMI, via les conditions imposées pour l’octroi de ses prêts, a eu tendance à préconiser les mêmes recommandations économiques et globalement les mêmes plans d’ajustement structurel à tout pays demandeur d’aide, sans analyser en profondeur la structure de chacun. Sur la base de ce qui a été dénommé le « consensus de Washington », il aurait ainsi systématiquement préconisé une plus grande ouverture aux capitaux étrangers et au commerce mondial de biens et services, la privatisation des entreprises publiques ainsi que l’austérité budgétaire.

Selon certains, les exigences du FMI envers des pays en développement d’Afrique auraient entravé la réforme des terres agricoles tout en contribuant à accroître les exportations des denrées alimentaires, et seraient ainsi en partie responsables de l’aggravation de la pauvreté, des flux migratoires vers les villes, et de l’émigration.

Le FMI a également été critiqué pour sa gestion de la crise asiatique de 1997, notamment parce qu’il a imposé la suppression de tous les dispositifs d’intervention des États dans leurs économies, interventions qui avaient pourtant permis la forte croissance des décennies précédentes, et dont le FMI reconnut plus tard qu’elles ne jouaient en rien un rôle néfaste dans la crise.

Mais l’ampleur des réformes demandées par le FMI à des économies jugées saines jusqu’alors fit croire aux investisseurs internationaux que la situation de ces pays était réellement catastrophique, ce qui eut pour conséquence de renforcer le mouvement de retrait des capitaux.

Ces critiques ont amené le FMI à revoir sa façon de procéder et à compléter les principes du consensus de Washington par d’autres éléments que ceux strictement axés sur les politiques macroéconomiques.

Désormais, le FMI accorde plus d’attention à la spécificité des besoins des pays dans lesquels il intervient et il fait preuve de plus de souplesse sur les questions touchant aux réformes structurelles. Le FMI souhaite également réserver une plus grande place aux aspects « macrosociaux », qui touchent à l’emploi et à la croissance, et à l’assistance technique pour la conception des programmes.

Le FMI n’a pas su anticiper le déclenchement de la crise financière de 2008

Un rapport rédigé par une équipe du Bureau indépendant d’évaluation (BIE) du FMI couvrant la période 2004-2007 a souligné l’incapacité de l’institution à prévoir l’éclatement de la crise financière de 2008.

Le rapport indique qu’en ce qui concerne le secteur financier aux États-Unis, le FMI n’a pas alerté sur la dégradation des normes d’octroi des financements hypothécaires, ni sur le risque que cette situation faisait porter aux institutions financières, mais qu’au contraire il s’est montré optimiste quant à l’efficacité de la technique de titrisation pour diluer les risques et a recommandé à d’autres pays avancés de favoriser la diffusion de ces méthodes.

Or, c’est justement l’innovation financière américaine, et plus particulièrement celle consistant à transférer les risques liés aux prêts hypothécaires « subprime » à de très nombreuses banques de par le monde, qui est à l’origine du déclenchement et de la propagation de la crise financière de 2008.

Même après l’amorce de la chute des prix de l’immobilier aux États-Unis, les services du FMI pensaient que les répercussions sur les institutions financières seraient minimes. Le rapport du FMI sur les États-Unis de 2007 a examiné plusieurs risques liés à l’innovation financière et les défis qu’ils posaient sous l’angle de la régulation — alors que les problèmes des marchés immobiliers et financiers étaient devenus évidents —, mais il est resté élogieux sur la robustesse et la résistance des grandes institutions financières, principalement en raison de leur rentabilité et de leurs niveaux de fonds propres.

Pour certains pays avancés dotés d’une réglementation relativement plus contraignante, le FMI a préconisé l’adoption de mesures qui s’inspiraient des méthodes adoptées aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les conseils ont notamment été centrés sur la promotion de l’innovation financière, considérée comme le principal facteur d’augmentation de la rentabilité aux États-Unis et au Royaume-Uni, avec peu ou aucun intérêt pour l’analyse des risques y afférents.

L’Allemagne et le Canada faisaient partie des pays avancés pour lesquels le FMI estimait que «…la rentabilité n’a pas encore atteint les niveaux internationaux et où l’innovation doit encore progresser»ou que«les stratégies timorées du système bancaire canadien donnent des rendements sur actifs beaucoup plus faibles qu’aux États-Unis ».

Pour les experts ayant rédigé le rapport du BIE, l’incapacité du FMI à identifier les risques liés à l’innovation financière aux États-Unis et à alerter à ce sujet s’explique par la conjonction de différents éléments :

  • un degré élevé de pensée doctrinaire,

  • un a priori intellectuel,

  • l’état d’esprit général selon lequel une crise financière était peu probable dans les pays avancés et

  • des méthodes d’analyse incomplètes.« Les lacunes de la gouvernance interne, notamment le manque de délimitation claire des attributions et des rapports hiérarchiques, l’absence d’incitation à une réflexion transversale et à l’expression d’opinions divergentes, …, et une culture du cloisonnement ont joué un rôle important ».

Des initiatives pour renforcer l’efficacité des missions de surveillance

Face à ces critiques, le FMI a engagé des initiatives pour renforcer sa mission de surveillance des pays membres et la rendre plus efficace.

En particulier, le cadre juridique de cette mission de surveillance a été réaménagé pour inclure les effets « de débordement », c’est-à-dire la façon dont les politiques économiques d’un pays peuvent influer sur les autres pays, ainsi que des analyses plus approfondies des risques et des systèmes financiers, notamment sur les liens entre économie réelle, secteur financier et stabilité financière.

Le FMI a notamment porté ses efforts dans les trois domaines suivants :

  • La rédaction et la publication de rapports sur les effets de contagion qui portent une attention particulière à l’impact des économies d’importance systémique.

  • La rédaction et la publication de rapports de surveillance des pays et de rapports de surveillance multilatérale, tels que les « Perspectives de l’économie mondiale » ou le « Rapport sur le Stabilité Financière dans le monde ».

  • La promotion des politiques favorisant une croissance durable de l’économie mondiale ainsi que la stabilité financière dans les enceintes internationales, telles que le Groupe des Vingt (G20) et le Conseil de stabilité financière.

Le FMI est également critiqué pour ses conseils de gestion de la crise financière

Le Bureau d’Évaluation Indépendante du FMI a également publié en novembre 2014 un rapport sur la réponse que l’institution a apportée à la crise économique et financière de 2008. Il en ressort un bilan assez mitigé.

Les experts estiment en effet que les appels du FMI en faveur de politiques de relance budgétaire à l’échelle mondiale en 2008–09 ont été appropriés et opportuns, de même que l’a été son soutien aux politiques monétaires très expansionnistes conduites dans les économies avancées à partir de 2010.

Par contre, ils jugent que son approbation en 2010–11 d’une réorientation de l’assainissement des finances publiques dans quelques-uns des plus grands pays avancés était prématurée.

Par ailleurs, la conjugaison d’une austérité budgétaire et d’une politique monétaire accommodante n’était pas pertinente aux yeux des auteurs du rapport, en raison des effets collatéraux négatifs des politiques d’assouplissement quantitatif des banques centrales des pays avancés sur les marchés financiers et les taux de change des pays émergents. Ils estiment donc que le FMI aurait dû demander un report dans le temps des politiques de consolidation des finances publiques car cela aurait alors limité le besoin d’une forte expansion monétaire.

 

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