Bonus

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Les bonus (ou primes) sont des rémunérations variables versées à des salariés en sus de leur rémunération fixe, en fonction de critères de performance ou de résultats personnels ou collectifs sur une période donnée.

Les bonus constituent une méthode de rémunération couramment pratiquée dans les entreprises par exemple pour les agents commerciaux. L’existence d’une partie variable de la rémunération tend cependant à se généraliser au plan collectif (intéressement par exemple) et individuel (individualisation des salaires, incitation à la performance).

Dans le contexte de la crise financière, ce sont essentiellement les bonus attribués dans les banques d’investissement qui font débat. (Un débat concerne également la rémunération des dirigeants des grandes entreprises : voir notre dossier Hautes rémunération en France).

Bonus des dirigeants : quelques chiffres

Début août 2009, en pleine crise économique ; la provision de 1 milliard d’euros par BNP Paribas pour le paiement à venir des bonus, avait ravivé la polémique sur les hautes rémunérations.

Outre Atlantique, les montants octroyés sont bien plus importants. Au début de l’année 2013, Google annonçait le versement d’un bonus de 15 millions d’euros à quatre de ses dirigeants.

Parallèlement, la banque d’affaire américaine, Goldman Sachs octroyait quelques 700 000 actions gratuites, soit 100 millions d’euros aux douze membres de son équipe dirigeante, un bonus en actions justifié par les bons résultats de la banque au titre de l’année 2012. Une décision qui a choqué au vu des pratiques contestables de cette banque et de sa responsabilité dans la crise des subprimes quelques années plus tôt.

Bonus : juste rémunération ou pratique choquante ?

Des observateurs ou acteurs du secteur font valoir que les bonus ne sont qu’une « juste » rémunération au regard de ce que ces salariés rapportent à leur banque et qu’ils rémunèrent une compétence pointue et rare.

Dans un contexte de mondialisation financière et donc de concurrence entre institutions, ils jouent aussi un rôle d’aimant pour attirer ou retenir les meilleurs spécialistes. La crise n’a pas aboli ces pratiques, la concurrence entre banques d’investissement restant toujours aussi vive. Une course aux bonus qui permet de maintenir la hiérarchie des places boursières mondiales, souvent l’une des premières industries nationales de certains pays comme les Etats-Unis d’Amérique et le Royaume-Uni.

À cette argumentation, d’autres opposent le caractère socialement choquant d’une reprise des bonus alors que la crise économique perdure, qu’elle se traduit notamment par une augmentation durable du chômage et que les banques bénéficient de fonds publics.

Au-delà de l’argument « moral », certains font valoir que la reprise du système des bonus signifie que « l’on recommence comme avant », et que des facteurs qui ont généré la crise sont à nouveau à l’œuvre. Les banques restaurent leurs profits sur les marges obtenues sur des activités « classiques » de crédit, pourtant restreintes, et surtout par la reprise des paris de court terme.

Selon certains mêmes, il n’y aurait pas d’inconvénient majeur à supprimer les bonus dans la finance, ni pour le financement de l’économie, ni pour la compétitivité des places financières.

Bonus : les effets pervers du système financier ?

S’agissant des bonus attribués dans la finance, non seulement le niveau mais aussi la structure des rémunérations ont été mise en cause. Aux yeux de nombreux observateurs, les bonus ont été une des causes de la crise, dans la mesure où ils ont constitué une puissante incitation (parmi d’autres) à privilégier les paris à court terme sur les marchés et des prises de risques excessifs de la part des banques d’investissement.

Certains effets « pervers » du système ont été soulignés :

  • Les bonus ne sont pas calculés sur les performances financières globales des banques mais uniquement sur celles des départements qui rapportent directement de l’argent aux banques comme ceux du « trading » (qui achètent et vendent sur les marchés) et de l’ingénierie des produits « innovants » (dérivés et titrisation). Les opérateurs qui les réalisent n’ont donc aucun intérêt à coopérer avec les services du contrôle interne des banques qui pourraient limiter leurs bonus. Ils ont intérêt à sous-estimer les risques.

  • Les bonus sont calculés sur le gain à court terme et de façon asymétrique (asymétrique signifie, en clair, « pile je gagne et face tu perds », comme on disait dans la cour des écoles). Les profits pris en compte sont ceux réalisés sur de courtes périodes et il n’y a pas de malus lorsque l’activité se révèle entrainer des pertes ou être moins rentable à plus long terme compte tenu des risques pris.

  • Les montants des bonus sont considérables. Ils n’ont cessé de croitre jusqu’à l’aggravation de la crise à l’automne 2008.

Ainsi en 2007, avant le déclenchement de la crise financière, les bonus versés dans les cinq plus grandes banques d’investissement américaines de l’époque ont été évalués à 38 milliards d’euros dont 20 pour la seule Goldman Sachs.

Bonus des dirigeants : un encadrement législatif renforcé en France…

Au début de l’année 2013, le gouvernement Ayrault avait annoncé la volonté d’encadrer davantage les salaires des dirigeants.

La réforme bancaire, adoptée en juillet 2013 (voir notre actualité : régulation, ce qu’il faut retenir de la loi bancaire), a instauré ce principe. Les bonus et autres rémunérations variables des dirigeants bancaires et des traders doivent désormais être inférieures au niveau de leurs rémunérations fixes (salaires). À noter que cette part variable peut toutefois excéder de deux fois au maximum la rémunération fixe, à condition que les actionnaires s’y prononcent favorablement par un vote en assemblée générale à la majorité qualifiée.

Pour les dirigeants « non bancaires », l’encadrement législatif s’illustre principalement par la mise en place du say on pay, c’est à dire par la mise en place d’un vote consultatif au sein des assemblées générales sur leur niveau de rémunération.

… et en Europe

Suite aux nombreux scandales révélés par la crise financière de 2008 concernant les rémunération de quelques hauts responsables bancaires et les prises de risque inconsidérées de certains traders, l’Union Européenne a mis en place un certain nombre de mesures destinées à limiter les bonus du secteur financier (banques et entreprises d’investissement).

Depuis le 1er janvier 2014, après plusieurs mois de négociation entre Etats membres de l’Union européenne, le plafonnement des bonus bancaires est entré en vigueur. Désormais, le montant de la rémunération variable ne doit pas excéder celui de la rémunération fixe. Sous certaines conditions, ce plafonnement peut aller jusqu’à deux fois la rémunération fixe sous réserve qu’il soit accepté à la majorité qualifiée en assemblée générale.

Une mesure qui ne ravit pas le Royaume-Uni. Dès le début des négociations, son ministre des Finances, George Osborne, s’était prononcé contre ce dispositif susceptible de créer des « effets pervers » en poussant par exemple les salaires fixes à la hausse ou en rendant plus difficile l’ajustement des rémunérations à la baisse. Le gouvernement britannique a d’ailleurs décidé de porter ces arguments devant la Cour de Justice du Luxembourg en septembre 2013.

Parallèlement, dès le début de l’année 2014, suite à des révélation d’un dirigeant d’HSBC sur les possibilités de contournement du plafonnement des bonus bancaires, les autorités européennes ont décidé de définir plus précisément le champ des employés du secteur financier concernés par l’application de cette mesure.

Pas moins de 15 critères qualitatifs (être membre de l’organe de direction de l’établissement, être en mesure d’engager des décisions ayant un impact significatif sur la gestion des risques, etc.) et 3 critères quantitatifs (percevoir une rémunération annuelle supérieure à 500 000 euros, faire partie des 0,3 % les mieux rémunérés, disposer d’un salaire au moins équivalent à celui d’un membre de la direction générale ou à d’autres preneurs de risques significatifs) ont été définis. Le Parlement et les Etats membres de l’UE disposent d’un délai d’un mois à compter du 4 mars 2014 pour avaliser ces nouvelles mesures.  

 

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