Crise financière : l’explication du jour : le plan français pour assurer le financement de l’économie et restaurer la confiance

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Le gouvernement français met en place un plan d’urgence de 360 Milliards d’€ de soutien aux banques. Ces mesures, qui devraient être adoptées cette semaine par le Parlement français constituent la déclinaison pour la France du plan d’action concerté des Etats membres de la zone Euro annoncé le 12 octobre. Comme on le sait le Royaume Uni a également présenté un plan équivalent.

Le ministre de l’Economie, Madame Lagarde, a déclaré que le plan est construit « pour que non seulement cela ne coûte pas, mais pour que cela rapporte à l’Etat ». Comment une telle chose est elle possible ? Comment le rêve d’Alphonse Allais (« il faut demander plus à l’impôt et moins au contribuable ») peut-il devenir réalité ?

Explications

Le plan contient deux dispositifs principaux :

  • La création d’une société dotée de 40 Milliards d’€ destinée à fournir des fonds propres (recapitalisation) aux banques qui en feront la demande.

  • La création d’une caisse de refinancement des établissements de crédit qui pourra fournir des prêts aux banques qui en feront la demande. Une enveloppe maximale de 320 Milliards d’€ a été fixée.

Pour financer ces fonds, l’Etat ne fait pas appel à l’impôt mais à l’emprunt.

Dans le premier cas, celui de l’outil de recapitalisation,La société de prise de participation de l’Etat (SPPE) a l’Etat pour seul actionnaire.

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Elle aura la garantie de l’Etat pour lever jusqu’à 40 milliards d’euros sur les marchés afin d’accroître les fonds propres des banques. La somme n’est pas déboursée immédiatement, mais seulement si les établissements financiers (banques et assurances) en font la demande. L’emprunt effectué par la SPPE fera partie de la dette publique puisque l’Etat est actionnaire à 100 %.Les banques françaises considèrent qu’elles n’ont pas à ce stade de problème de solvabilité et qu’elles ont un rapport entre leurs fonds propres et les crédits qu’elles ont distribués au dessus des règles internationales actuelles (ratio dit de Bâle II).

Cependant l’application de plans équivalents dans d’autres pays (notamment en Allemagne et au Royaume Uni) va conduire les banques de ces pays à avoir des ratios plus élevés et les banques françaises vont être incitées à se mettre à ce niveau pour éviter tout risque de déplacement de clientèle vers ces banques supposées plus sûres.Si les 40 milliards d’euros sont entièrement utilisés, cela représentera 2 points de plus de dette publique par rapport au PIB (ce ratio est actuellement de65,7%,déjà supérieur à la limite de 60% fixée dans le traité de Maastricht). Le coût de cette dette, qui pourrait représenter jusqu’à 2 milliards d’euros, sera assumé par la SPPE et constituera une dépense supplémentaire pour le budget de l’Etat. En échange de ses apports en capital, la Société recevra des actions préférentielles ou « titres subordonnés » émis par les banques. La valeur de ces titres sans droit de vote sera calculée à partir des cours actuels des banques (qui sont très bas). Et en cas de hausse de la Bourse, ils prendront automatiquement de la valeur. De plus la SPPE percevra ensuite des dividendes. L’impact final ne peut donc être établi à ce stade.

Dans le deuxième cas, celui de l’outil de fourniture de liquidités c’est la Caisse de Refinancement des Etablissements de crédit, créée à cet effet, qui emprunte et l’Etat français apporte sa garantie, ce qui permet d’effectuer des emprunts à plus faible taux d’intérêt. Le capital de la caisse sera souscrit à 66% par les banques françaises et à 34% par l’Etat.

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L’Etat aura ainsi une minorité de blocage et un droit de véto. Mais ces emprunts ne figureront pas dans la dette de l’Etat ni même dans la dette publique au sens des critères de Maastricht. Les 320 Milliards ne seront pas empruntés immédiatement et en une fois mais progressivement et pour autant que les banques effectueront des emprunts à la Caisse. Les emprunts effectués par la caisse, bénéficiant de la garantie de l’Etat, obtiendront des conditions favorables compte tenu de l’aversion actuelle des investisseurs pour le risque et de leur demande de sécurité. Qui seront les investisseurs ? On peut supposer qu’il s’agira notamment d’investisseurs institutionnels, de fonds de pension, de fonds souverains qui ont de fortes disponibilités.

La Caisse de refinancement accordera des prêts aux banques qui en feront la demande. En garantie, celles-ci déposeront à la Caisse des actifs qui devront être de bonne qualité. Ce ne seront pas des « actifs toxiques ».

Le refinancement est assuré à titre onéreux de manière que les bénéficiaires assument un coût correspondant à des conditions normales de marché 5 taux supérieur au taux d’emprunt garanti par l’Etat Mais inférieur aux conditions actuelles du marché du crédit interbancaire). Dans ces conditions, la caisse pourrait faire des bénéfices.

Risques ?

L’impact réel sur les finances publiques dépendra en réalité de l’évolution de la crise financière et de la situation économique générale.Si les actions engagées arrivent à juguler la crise financière, le recours à ces financements restera limité, et la valeur des actions et des actifs déposés en garantie tendra à augmenter. Inversement, si la crise perdure ou s’aggrave encore, les fonds peuvent se révéler insuffisants, la valeur des actions et des garanties pourrait diminuer. Parallèlement, les effets mécaniques du freinage de la croissance sur les finances publiques creuseraient le déficit, conduirait l’Etat à s’endetter à des conditions moins favorables qu’aujourd’hui.. C’est le scénario noir dont il faut espérer qu’il ne se réalisera pas.

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