Après la crise

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Apres la crise

Une crise économique comme celle que nous vivons depuis 2007 est affaire d’économistes. Comme la profession est nombreuse, leurs analyses abondent. Que reste-t-il à dire au sociologue ? interroge l’un des plus importants d’entre eux, Alain Touraine dans « Après la crise », court et percutant essai paru en septembre 2010.

Eclairage irremplaçable

Bien des choses en somme, répond-il . D’abord parce que l’échec de la pensée économique dominante, qui n’a rien vu venir, est patent. Or ce qui caractérise cette pensée et explique largement cet échec est justement « qu’elle ne laisse aucune place à l’étude des acteurs sociaux et politiques, rejetés par les modèles de l’acteur économique rationnel ». Certes, des économistes critiques de cette pensée tels Joseph Stiglitz ou Paul Krugman ou ceux, en France, de « l’école de la Régulation » n’ont pas cessé d’intégrer les facteurs non économiques dans leurs analyses de la situation économique. Mais, dit Alain Touraine, l’éclairage du sociologue reste irremplaçable. Cherchant à comprendre les acteurs, leurs choix et leurs représentations et inscrivant son travail dans le temps long, il est le mieux à même de relier l’analyse de la crise à une perspective de transformation à long terme de la vie sociale.

La société n’existe plus

Or ce que nous dit le sociologue Alain Touraine est particulièrement saisissant. Son diagnostic est que « la société n’existe plus ». Selon lui, la décomposition de la vie sociale, très manifeste avec la crise, ne date pas de celle-ci. Avec la globalisation, l’économie n’appartient plus à la société. Les institutions sociales et politiques qui étaient capables de maîtriser, d’orienter et de réguler la vie économique dans le cadre de la société industrielle, sont pratiquement impuissantes ou en décomposition. Selon Alain Touraine, il n’y a pas de retour en arrière possible « Les sociétés industrielles ont été blessées à mort et on ne peut leur redonner vie ». Deux voies seulement sont ouvertes. Ou bien une cascade de crises jusqu’à des catastrophes sociales, écologiques, culturelles ou politiques. C’est, dit il, la voie la plus probable. Mais ce n’est pas la seule. L’autre voie est celle d’une recomposition d’un nouveau type de vie sociale, « d’une reconstruction de rapports entre les acteurs économiques, la reformulation de leurs valeurs communes et de nouvelles interventions publiques ». Le fondement de ce renouveau doit être selon lui celui des droits universels de tous les êtres humains. « Face à une vie sociale affaiblie ou mise en miette par le capitalisme financier…nous avons besoin, affirme-t-il, avant tout de redonner vie à un humanisme respectueux de tous les êtres humains ».

 


Alain Touraine, sortir de la crise par liberation

Alain Touraine Idées Seuil Septembre 2010, 192 pages, 18 €

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