BRICS

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En 2001, un économiste de Goldman Sachs, Jim O’neill, affirmait  que les économies du Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine étaient appelées à connaitre un développement rapide, donnant ainsi naissance à l’acronyme BRIC, qui s’enrichira de la lettre S suite à l’inclusion de l’Afrique du Sud en 2011.

Dix ans plus tard, les faits lui donnent raison car même si leurs économies possèdent des caractéristiques très différentes, ces pays ont connu une ascension fulgurante dans l’économie mondiale.

L’ascension fulgurante des BRICS

Entre 2000 et 2008, la croissance des BRICS est nettement supérieure à celles des pays développés. La croissance de ces pays a connu un fléchissement et atteint en 2009 son plus bas niveau : – 7,8 % de croissance pour la Russie et la Chine passe de 14, 2 % de croissance en 2007 à 9,6 % en 2009. Parmi les BRICS, la Chine affiche depuis une vingtaine d’années des taux de croissance les plus élevés. 

Depuis 2014, notamment du fait de la baisse du prix des matières premières, la situation économique de la Russie, du Brésil et de l’Afrique du Sud s’est sensiblement dégradée.

Croissance comparée des pays développés et des BRICS

La place des BRICS dans l’économie globale ne cesse de croître. En 1990, leur poids dans le PIB mondial atteignait à peine 10 % contre 25,5 % en 2018. Aujourd’hui, elles totalisent un PIB de près de 20 000 milliards d’euros et comptent près de 3,1 milliards d’habitants, soit  42,1 % de la population mondiale. Une ascension confirmée par la place désormais occupée par les BRICS dans le classement des pays les plus puissants au monde réalisé tous les ans par le Fonds Monétaire International (FMI) sur la base de leur PIB. En 2018, la Chine y occupe la deuxième place, suivie de près par l’Inde (7e place), le Brésil (9e place) et la Russie (12e place). L’Afrique du Sud occupe quant à elle la 32e place. Dans ce classement, la France se situe à la 6e place derrière les États-Unis, la Chine, le Japon, l’Allemagne et le Royaume-Uni.

La croissance des BRICS vue du côté des marchés financiers

Jusqu’en 2007, les indices synthétisant l’évolution des actions issues des marchés émergents – dont font partie les BRICS – ont surperformé les indices traditionnels. Cependant, au cours de ces trois dernières années, l’indice « MSCI marchés émergents » dans lequel les BRICS pèsent à eux seuls plus de 40 % (sur 24 pays) a stagné là où l’indice S&P 500, reflétant l’évolution des 500 plus grosses capitalisations américaines, gagnait près de 20 %. Les indices émergents sont aussi plus volatils.

La crise financière de 2007/2008, par ses répercussions mondiales, a eu pour effet d’amortir les performances des pays émergents rendant ainsi l’évolution de leurs indices boursiers plus ou moins semblable à celle des marchés financiers des pays développés, voire moins favorable durant la période de crise.

Comment expliquer le dynamisme économique des BRICS ?

Là où les pays occidentaux s’orientent désormais vers un modèle économique tourné vers les services, les BRICS, surtout la Chine, ont nourri leur croissance grâce à leur force industrielle. Cette force fut encouragée dans les premiers temps de leur essor économique par des politiques publiques interventionnistes (investissements dans l’éducation, la formation, les infrastructures, etc.), notamment en Chine. Ces politiques se sont matérialisées par une réallocation des facteurs de production vers les secteurs les plus productifs de l’économie, et notamment l’industrie manufacturière, se traduisant dans ces secteurs par un accroissement de la productivité du capital et du travail (phénomène de rattrapage technologique vis à vis des économies les plus avancées). Dans ce contexte, la croissance des BRICS a été stimulée par un formidable essor des exportations.

Ainsi, entre 1997 et 2018, le volume d’exportations de la Chine a été multiplié par 13, celui de l’Inde par 7 et celui du Brésil par 3. 

Evolutiondu volume des exportations des BRICS

En 2010, la Chine est ainsi devenue le premier exportateur de marchandises du monde devant les États-Unis. La Russie, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud, figurent quant à eux constamment dans la liste des 30 premiers exportateurs mondiaux de marchandises.

Par ailleurs, la faiblesse des  coûts de production de la Chine, de l’Inde et du Brésil a exercé une véritable  force d’attraction pour les investissements directs étrangers (IDE) en provenance des autres pays du monde. Par exemple, les capitaux mondiaux reçus par la Chine ont été multipliés par quatre depuis les années 2000 (implantation d’entreprises étrangères ou rachat d’entreprises locales). L’importance de ce phénomène a amené plusieurs nations occidentales à dénoncer une concurrence déloyale entrainant des délocalisations massives d’activités. 

Autre facteur de dynamisme : une  population jeune et dynamique qui elle-même constitue une base non négligeable de soutien de la  demande intérieure, en particulier pour la Chine (où la population va néanmoins vieillir rapidement), l’Inde et le Brésil. Au terme de leur processus de rattrapage des économies développées, ces caractéristiques démographiques pourraient leur permettre de maintenir un niveau de croissance stable à long terme. 

La consommation domestique agit déjà comme un relais de croissance en Chine. Depuis la crise de 2007, la demande mondiale a augmenté moins rapidement et  les exportations chinoises ont marqué le pas. L’excédent du compte courant chinois, de  9.9 % du PIB en 2007, s’établit   0,8 % du PIB en 2018.

La croissance s’est maintenue en Chine aux alentours de 6,5 % en 2018. La consommation intérieure joue aujourd’hui un rôle croissant dans le processus de rattrapage économique chinois.  

BRICS : un essor plus économique que social

Globalement l’essor économique des émergents a contribué à réduire la pauvreté observée sur leur territoire. Néanmoins, de nombreux progrès restent encore à faire en matière de réduction des inégalités, de justice sociale, d’éducation … 

La pauvreté s’est réduite…

De 1990 à 2018, le nombre de personnes vivant avec moins de deux dollars par jour a reculé dans toutes les zones du globe. Ce recul est nettement marqué en Asie de l’Est, en Amérique latine et en Asie du Sud. La Chine, l’Inde et le Brésil y ont fortement contribué de sorte que le ratio de la population vivant sous le seuil mondial de pauvreté (deux dollars par jour) a significativement diminué chez ces émergents.

La réduction de la pauvreté se retrouve dans l’évolution de l’indice de développement humain (IDH) qui est passé en Chine de 0,5 en 1990 à 0,75 en 2018 (la Norvège, pays le mieux classé au monde, présente un IDH de 0,95).

Cette diminution globale de la pauvreté se retrouve dans l’évolution de l’espérance de vie moyenne. La Chine, le Brésil et l’Inde connaissent une augmentation continue de cette dernière. La Russie stagne cependant, et l’Afrique du Sud connait des turbulences liées à la sa situation politique particulière.

Esperance de vie moyenne par pays

… mais des progrès restent à faire

Si on peut qualifier les émergents de nations économiquement dynamiques, on ne peut pas en dire autant sur le plan social. Le niveau de vie qui y est observé reste encore largement inférieur à celui des pays développés. Le PIB par habitant mesuré en parité de pouvoir d’achat (PPA), c’est-à-dire correction faite des différences de prix et de l’influence des taux de change, s’établit ainsi en 2018 en Chine à 16 096 dollars, à 6 925 dollars en Inde contre 55 534 dollars aux Etats-Unis ou 40 507 dollars en France. 

De fortes inégalités s’y sont également développées. En Chine, de 2 000 à 2016, les 20 % les plus riches ont vu leur revenu croître de 16 % par an, alors que pour les 20 % les plus pauvres la croissance des revenus n’a été que de 8,5 %.

On constate la même tendance en Inde, en Russie et en Afrique du Sud. L’indice de Gini, mesure courante des inégalités de revenus et dont le coefficient est compris entre 0 (égalité parfaite : tout le monde a la même richesse) et 1 (inégalité absolue : une seule personne possède la totalité des richesses du pays), a des valeurs encore bien hautes.

En Inde, il est de 0,368 en 2012 ; en Russie de 0,412 en 2015 ; en Chine de 0,465 en 2016 ; au Brésil de 0,49 en 2014, et il est très haut en Afrique du Sud : 0,625 en 2013. L’aspect inquiétant de ces chiffres se révèle surtout dans leur stagnation depuis les années 2000 : à part au Brésil (ou le coefficient était alors de 0,59), les inégalités n’ont pas baissé significativement.

Le groupe des BRICS a donc encore des progrès à faire. Sans surprise, aucun d’entre eux n’apparait dans le haut du classement de l’indice de développement humain (IDH). Le premier d’entre eux en 2018 ne se situe qu’à la 49e place. Il s’agit de la Russie, avec un indice de 0,816. 

Les enjeux de la soutenabilité de la croissance des BRICS

Le ralentissement de la croissance des BRICS au cours des dernières années suscite bon nombre d’interrogations, notamment sur les marchés financiers. 

Par ailleurs, leur fort degré de dépendance vis à vis de l’extérieur (besoin important en matières premières pour la Chine et L’Inde, en capitaux étrangers pour l’Afrique du Sud et le Brésil, poids des exportations) pose la question de la soutenabilité à long terme de leur croissance. Ainsi, la plupart des économistes s’accordent à penser que la pérennisation de la croissance des BRICS repose désormais sur le développement de la consommation domestique ainsi que sur la prise en compte de facteurs sociaux et environnementaux.   

Cette évolution apparaît d’autant plus nécessaire que des économies émergentes (Mexique,  Bengladesh, Corée du Sud et d’autres rassemblées sous le vocable des « onze prochains » (ou Next 11) concurrencent désormais les BRICS sur les marchés mondiaux en s’appuyant pour la plupart sur une stratégie de développement fondée sur la faiblesse des coûts salariaux. 

Mais peut-être faudrait-il revoir cette catégorisation, car les cinq pays composant les BRICS, possèdent des caractéristiques sensiblement différentes, et les enjeux n’y sont pas les mêmes, voire sont opposés (par exemple une hausse du prix du pétrole profite à la Russie mais pénalise la Chine et l’Inde).

 

    12 commentaires sur “BRICS”
      1. Bonjour,
        Certains BRICS font partie des plus importants émetteurs de gaz à effet de serre. A ce titre, chaque pays envisage ou a déjà entrepris des mesures, notamment afin d’atteindre la neutralité carbone. Vous en trouverez la liste sur la page suivante : https://www.unep.org/explore-topics/climate-action/what-we-do/climate-action-note/climate-action-progress.html. Du reste, les BRICS pourraient, selon certains observateurs, renforcer leurs actions en matière environnementale avec la création d’un « Climate Club ».
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

      1. Bonjour,
        Vous trouverez quelques éléments d’explication dans la section « Comment expliquer le dynamisme économique des BRICS ? » de l’article ci-dessus.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    1. Salut, je m’appelle Soraya.
      Je voudrais que vous m’expliquiez un peu pourquoi la place qu’occupe les PMA dans les échanges mondiaux est insignifiante.

      1. Bonjour Soraya,
        Les pays les moins avancés (PMA) représentent, effectivement, une part très faible des échanges commerciaux à l’échelle internationale. Plusieurs facteurs permettent d’expliquer cette situation. Tout d’abord, les capacités de production de ces pays sont généralement limitées, ce qui réduit les possibilités d’exporter des biens et des services vers le reste du monde. Ensuite, les PMA n’ont pas nécessairement accès à certaines technologies, ce qui les empêche de pénétrer les marchés de certains pays développés qui peuvent imposer des normes spécifiques. Enfin, les possibilités de financement sont moindres dans les PMA, ce qui rend difficilement envisageable la participation active au commerce international.
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

        1. il est essentiel de revoir la notion de pib.
          sachant qu’un produit  » made in … » ne porte cet appellation si il est produit a 40 % dans le pays cite. ( cf omc)

    2. Excusez moi mais vous avez écrit cet article en 2019, or déjà en 2013 le créateur de l’acronyme Jim O’Neill déclarait que s’il pouvait le changer il n’aurait laissé que le « C », rajoutant que des facteurs plus ou moins imprévisibles pouvaient intervenir et entraver la croissance rapide de certains de ces pays (ce qui a depuis était observé)
      Aujourd’hui le concept de BRICS n’a plus aucun sens, déjà à la base avoir la Russie n’avait aucun sens, ce n’est pas un pays en voie de développement mais en redéveloppement, ils se reprenaient de leur chute, puis l’Afrique du Sud n’a jamais été un pays émergent, c’est absurde de l’avoir rajouté.
      Cela fait maintenant au moins 5 ans que la Russie et le Brésil vont très mal après leurs crises économique (ainsi que politique pour le Brésil), l’Inde connait d’innombrables problèmes et va aussi mal économiquement, l’Afrique du sud n’en parlons pas. Et la Chine l’unique des 5 qui semble aller bien de plus en plus d’experts remettent en question sa situation économique.

      1. Bonjour,
        Vous avez raison de pointer la faible croissance de certains pays composant initialement les BRICS. Cependant, nous avons mis à jour cet article en 2019 (et non pas écrit, comme indiqué sur le site) pour pointer les difficultés de la Russie, du Brésil et de l’Afrique du sud ces dernières années (par exemple sur le graphique comparant la croissance des pays).
        Meilleures salutations
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

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