Invité par la société Harvest à donner son point de vue sur ce que devrait être 2010 pour les investisseurs, Marc Fiorentino, président de la société Euroland Finance (entreprise d’investissement) et chroniqueur à BFM, a apporté des réponses personnelles – rappelant à plusieurs reprises non sans humour qu’il s’était très souvent trompé – à quelques questions autour de la crise.
Quelques réflexions sur l’origine de la crise
La crise actuelle trouve son origine dans une injection massive de liquidités, elle-même consécutive au 11 septembre 2001. A partir de 2004/05, le système a commencé à déraper avec des produits devenus totalement incompréhensibles … Mais, dans un contexte de croissance forte, sans chômage, avec émergence des pays dits émergents, personne n’a voulu « siffler la fin de la récréation ».
A qui la faute ? A tout le monde : traders, banquiers, mais aussi gouvernements et autorités de contrôle…
Les banques centrales et les gouvernements ont-ils bien réagi ?
Les banques centrales ont jusqu’à présent fait un travail exceptionnel, estime Marc Fiorentino. Ben Bernanke, grand spécialiste de la crise de 29 et de la déflation a immédiatement réagi, en baissant les taux et en prenant des « mesures non conventionnelles de relance monétaire », traduisez « l’Etat émet des obligations, les banques centrales les rachètent et les réinjectent dans l’économie ».Mais les gouvernements ont fait de l’agitation anxiogène, partout des plans de relance par la consommation qui ne marchent pas.
Que nous disent les marchés ?
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Obligations : les taux sont bas aussi bien à long terme qu’à court terme ; cela signifierait qu’il n’y a pas de problème de signature des Etats, ce que Marc Fiorentino trouve surprenant eu égard à l’augmentation des déficits publics.
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Actions : la remontée des cours a l’air de dire que, pour les opérateurs, le pire est passé ; la remontée plus spectaculaire encore des pays émergents signifie que pour les marchés, le salut viendra des pays émergents…
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Changes : En ce moment sur ce marché, les opérateurs qui pratiquent le « carry trade », c’est-à-dire l’opération spéculative consistant à profiter des écarts de rendement entre les monnaies empruntent du dollar et placent le produit en euros ou en pétrole. Une nouvelle bulle est en train de se créer.
Le monde va-t-il changer ?
Les banques recommencent à verser des bonus comme avant, même davantage.
Goldman Sachs prévoit de verser 20 milliards de dollars au titre de 2009, soit plus qu’en 2007, somme qui correspond à 740 000 dollars par employé !
Les réglementations seront plus lourdes, mais n’est ce pas déjà pour contourner les règles que le hors bilan a été créé ?
Quel scénario économique pour demain ?
Le consommateur américain, sur lequel a reposé la croissance mondiale depuis 1945, a changé de comportement : son taux d’épargne était de -3,8 % en 2008, il est de 7 % aujourd’hui. Ce changement de comportement sera-t-il durable ? Marc Fiorentino le pense. Quel autre consommateur va pouvoir remplacer le consommateur américain ?
Autre question : celle de la dette des Etats, impossible à rembourser, dans un contexte de croissance extrêmement « molle ».
Où placer son argent ?
Marc Fiorentino est persuadé que le CAC 40 peut encore monter pour atteindre 4100 voire 4500 points dans les semaines qui viennent. Mais il est tout aussi persuadé qu’il devrait se stabiliser à un niveau inférieur. Il est donc, pour ce qui le concerne, liquide, et se méfie des obligations d’Etat, et surtout de celles qui sont émises par les pays dont les nationaux épargnent peu (au contraire du Japon ou de la France qui peuvent compter sur leurs citoyens pour financer leur déficit).
En revanche, il est moins méfiant à l’égard de certaines obligations dites « corporate », c’est-à-dire de grandes entreprises, qui servent actuellement un intérêt élevé alors que leurs comptes sont sains.