Rapport sur le développement humain 2013 : l’essor du Sud

la finance pour tous
« L’essor du Sud, le progrès humain dans un monde diversifié », tel est le titre du nouveau rapport sur le développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Cette étude de plus de 200 pages se penche cette année sur « la transformation fulgurante d’un certain nombre de pays en développement en grandes économies dynamiques, dotées d’un poids politique croissant, ayant une influence considérable sur la progression du développement humain ».

Ce rapport met en lumière « les progrès en cours et les défis futurs à réaliser ». Décryptage des principaux points abordés :

L’essor incontestable des pays du Sud…

Outre l’essor significatif de la plupart des pays en développement, ce rapport met en avant le développement rapide de certains grands  « pays du Sud » à savoir le Brésil, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Inde, regroupés sous l’acronyme des BRICS et la Turquie. D’autres économies « plus petites » ont également réalisé des progrès considérables (le Bangladesh, le Chili, le Ghana, l’Ile Maurice, le Rwanda, la Thaïlande et la Tunisie). Point commun de tous ces pays :  des réformes économiques pragmatiques, des efforts en matière d’éducation et de protection sociale et enfin un développement des exportations. 

La Chine, l’Inde et le Brésil : l’avènement d’une nouvelle ère économique

Fait marquant relevé par le rapport,  le poids économique et la puissance incontestable des trois principaux pays en développement que sont la Chine, l’Inde et le Brésil :« Ils devraient représenter [à eux trois] 40 % de la production mondiale en 2050 contre 10 % en 1950 ». Poussé en partie par la demande intérieure (quelques milliards de consommateurs) et grâce aux différentes  politiques de développement menées à plusieurs échelles, ce bloc« émerge aujourd’hui comme un terrain fertile pour l’innovation technologique et l’entreprenariat créatif ».

L’essor du Sud  s’explique surtout  par l’envolée des échanges commerciaux  : « entre 1980 et 2010, leur part dans le commerce mondial des marchandises est passée de 25 % à 47 % et leur part dans la production mondiale est passée de 33 % à 45 % ». Cette mutation de la répartition des échanges commerciaux mondiaux initiés par les pays émergents s’est traduite par des retombées positives sur l’ensemble des économies du Sud.

… mais les inégalités de revenus persistent

Si l’indice de développement humain relève des progrès significatifs dans la majorité des pays en développement, notamment en matière de santé et d’éducation, les inégalités de revenus sur ces deux dernières décennies  persistent et s’accroissent. C’est particulièrement le cas pour les États arabes et ceux d’Asie de l’Est et du Pacifique. Seule l’Afrique Subsaharienne enregistre une baisse des inégalités de revenus sur la même période. Sur ce point, les auteurs précisent que « les inégalités freinent le rythme du développement humain » tout en rappelant néanmoins que : « la plupart des études s’accordent sur l’ampleur des inégalités mondiales en termes de revenus, même si le consensus n’est pas total à l’égard des tendances récentes ».

Les moteurs de transformation du développement…

Du point de vue des auteurs, l’essor du Sud a principalement été soutenu par trois moteurs qui sont l’engagement d’un État « fort, dynamique et responsable », l’accès aux marchés mondiaux et l’innovation en matière de politique sociale.

L’engagement d’un État « fort, dynamique et responsable »

Le rapport souligne les initiatives personnelles des pays émergents. En effet, il n’existe pas un mais plusieurs modèles de développement,  car tous les pays du Sud n’ont pas les mêmes caractéristiques. Les faits montrent que chaque Etat  a proposé des solutions pragmatiques  et innovantes  en fonction du contexte politique, économique, social et culturel de chacun. Les points forts étaient notamment  l’investissement dans les services sociaux de base (éducation, santé, services publics), la création d’emplois de qualité, le développement industriel, la promotion des exportations et le développement technologique.

L’accès aux marchés mondiaux

Dans les pays du sud, l’État s’est parfois substitué aux entreprises privées. En intervenant ainsi, les gouvernements ont permis la mutation d’un certain nombre d’industries qui,  aujourd’hui,  sont présentes sur les marchés à l’exportation. Le rapport insiste sur les stratégies des pays nouvellement industrialisés qui ont pratiqué  « une intégration graduelle et par étapes à l’économie mondiale ». En exemple sont donnés les petits pays qui privilégient quelques « niches » à l’exportation pour développer progressivement leur industrie.

L’innovation en matière de politique sociale

Le rapport insiste sur l’importance des politiques sociales afin que chacun profite des effets  de la croissance. Elles doivent permettre l’intégration de toutes les catégories de populations dans le processus de création de richesse nationale. Selon les auteurs, les  investissements dans les infrastructures, la santé et l’éducation développent des synergies entre croissance économique et progrès social.

… et leur pérennisation à long terme

Si de nombreux pays du Sud semblent avoir gagné la voie du développement,« les succès futurs ne sont pas garantis pour autant ». Pour maintenir et conserver les progrès jusqu’ici réalisés et les étendre à d’autres pays avancés, le rapport met en avant quatre domaines d’action dans lesquels ces pays du Sud doivent s’engager :

  • Le renforcement de l’équité et la promotion du développement humain :« les recherches réalisées […] ont montré que le niveau d’instruction d’une mère est plus important pour la survie de son enfant que le revenu du foyer ou la richesse et que les interventions politiques ont un impact plus significatif là où les résultats scolaires sont initialement plus faibles » ;

  • La représentation et la participation des populations dans les instances de décision :« les personnes doivent être en mesure d’influencer les décisions et les résultats ; il est crucial d’offrir aux jeunes des perspectives économiques et une participation politique plus importantes » ;

  • L’intégration des changements climatiques dans les modèles de développement :« Si l’on veut garantir des économies et des sociétés durables, de nouvelles politiques et des changements structuraux doivent être mis en œuvre, capables d’harmoniser le développement humain et les objectifs de réduction d’émissions » ;

  • La gestion de l’évolution démographique : Face au constat du doublement de la population mondiale entre 1970 et 2011, essentiellement dans les pays du Sud, le rapport du PNUD recommande de « relever les niveaux d’instruction tout en augmentant les opportunités d’emploi, en réduisant le chômage, en encourageant la productivité et en accroissant la participation de la main d’œuvre, en particulier pour les femmes et les travailleurs âgés ».

Le rapport dresse le portrait d’un monde en mutation où l’équilibre entre les pays  évolue. Mais l’intérêt de cette étude est surtout  de  montrer la richesse des innovations en matière de politique de développement et d’encourager les décideurs politiques à poursuivre  ces politiques ambitieuses  afin de « promouvoir le développement humain dans un plus grand souci d’équité, de durabilité et d’intégration sociale ».