Une économie indifférente au blocage politique
Depuis les élections fédérales allemandes du 24 septembre 2017 qui ont vu la percée du parti d’extrême droite AFD (Alternative für Deutschland), l’Allemagne n’a toujours pas de gouvernement.
En effet, Angela Merkel et son parti (la CDU) sont arrivés en tête mais ne disposent pas d’un nombre suffisant de sièges au parlement (le Bundestag) pour former un gouvernement. Angela Merkel doit donc s’allier à d’autres partis afin de former une coalition. Pour l’instant, les négociations autour d’une éventuelle coalition n’ont pas abouti et l’Allemagne se retrouve sans gouvernement, une situation inédite depuis 1949.
Pour l’heure, la crise politique n’a aucun impact sur la situation économique. La croissance allemande a atteint 0,8 % au troisième trimestre 2017 et devrait être de 2,1 % en 2017 selon le World Economic Outlook. Cette croissance est, comme souvent en Allemagne, tirée par les exportations qui ont crû de 1,7 % au troisième trimestre alors que les dépenses du gouvernement et des ménages sont restés inchangées. Le chômage, quant à lui, est toujours en baisse et, à 5,4 %, atteint son plus bas niveau depuis la réunification.
Pour l’instant donc, la crise politique n’impacte pas l’économie. A court terme, un blocage politique prolongé ne devrait pas avoir d’incidence notable sur la croissance, notamment car celle-ci est tirée par les exportations qui dépendent en bonne partie de la demande adressée par les autres pays.
A plus moyen terme cependant, les incertitudes politiques pourraient pénaliser les investissements, par exemple en écornant l’image de stabilité associée à l’Allemagne ou en créant de l’incertitude quant aux politiques économiques futures.
La croissance allemande, un problème pour les voisins ?
Les exportations sont le moteur de l’économie allemande. Le pays parvient à exporter massivement du fait de la qualité de ses produits mais aussi d’une politique de modération salariale qui permet de contenir les coûts.
La conséquence de cette politique est une consommation des ménages relativement faible, qui limite les importations. De plus, l’Etat allemand mène une politique budgétaire restrictive, visant à réduire la dette, ce qui freine la consommation et l’investissement intérieur.
La conséquence de cette situation est que l’excédent commercial allemand est gigantesque et que son excédent courant dépasse 8 % du PIB, un niveau colossal.
La balance commerciale ne représente que les échanges de biens, alors que la balance courante retrace aussi d’autres échanges comme les services ou les transferts de revenus. Pour appréhender les échanges d’un pays avec l’extérieur, il est préférable de regarder sa balance courante qui donne une vision plus exhaustive que la seule balance commerciale.
Le problème des excédents allemands est qu’ils se font au détriment de ses partenaires commerciaux, en partie européens. En effet, si un pays exporte plus qu’il n’importe, cela signifie mécaniquement que d’autres importent plus qu’ils n’exportent.
En d’autres termes, en promouvant ses exportations, l’Allemagne dynamise sa croissance en partie au détriment des autres pays, d’où des critiques récurrentes, par exemple de la part de Donald Trump.
De nombreux économistes (par exemple le Fonds Monétaire International ou le magazine The Economist) recommandent que l’Allemagne augmente ses investissements et sa consommation (par exemple en augmentant les salaires) de façon à réduire son excédent commercial.