Un nouveau président pour le Chili

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Le conservateur Sebastián Piñera a été élu président du Chili. Il succède à la socialiste Michelle Bachelet. Qu’attendre de la future politique économique alors que le Chili, qui a été ces trente dernières années un modèle de développement économique en Amérique Latine, connait des difficultés ?

Basculement à droite

Un nouveau président pour le ChiliL’homme d’affaires et homme politique Sebastian Piñera, qui avait déjà dirigé le pays entre 2010 et 2014 (la constitution lui interdisait de briguer un second mandat consécutif), a été élu le 17 décembre 2017 président de la République avec plus de 54 % des suffrages face à son rival de centre gauche Alejandro Guillier (45,43 % des voix), soutenu par l’ancienne présidente Michelle Bachelet.

Sebastian Piñera est économiste de formation, puis a fait fortune notamment en lançant des cartes de crédit au Chili dans les années 1980. Ayant des intérêts dans la télévision, le football ou le transport aérien, sa fortune est estimée à 2 milliards d’euros.

Politiquement, bien qu’étant ouvertement conservateur, il a toujours cherché à se démarquer d’Augusto Pinochet et de son héritage. Au Chili, les années de la dictature sont encore dans toutes les mémoires (le pays n’est revenu à la démocratie qu’en 1990) et ce souvenir façonne encore le débat politique. Socialement, il a promis de revenir sur les réformes instaurées par les socialistes comme le mariage homosexuel et la dépénalisation de l’avortement.

Quel avenir pour l’économie chilienne ?

Le Chili a connu ces trente dernières années une solide croissance économique qui en a fait le pays le plus prospère et stable d’Amérique latine. Entre 1990 et 2013, la croissance économique moyenne du pays a été légèrement supérieure à 5 %. On qualifie parfois le Chili de « jaguar », de la même façon que l’on nommait les pays d’Asie à forte croissance les « tigres ». Cette croissance avait commencé dans les années 1980 sous la direction d’Augusto Pinochet (qui était aussi libéral en économie qu’il était autoritaire politiquement) et avait continué suite au retour à la démocratie en 1990.

Cependant, ces dernières années, le miracle chilien semble avoir perdu de son lustre. En effet, en 2017, la croissance devrait être d’environ 1,3 %, un chiffre faible pour un pays dont le PIB par habitant est environ deux fois plus faible que la moyenne des pays riches (le PIB par habitant y est de 15 700 dollars mais, en parité de pouvoir d’achat, il atteint en 2017 24 500 dollars).

Le pays est très dépendant du cuivre, dont il est le premier exportateur mondial et qui représente la moitié des exportations du pays. Ces dernières années, le pays a souffert de la baisse marquée du cours de ce métal, causée entre autres par le moindre appétit de la Chine pour ce minerai. Le pays souffre aussi de la faiblesse de la productivité de son agriculture (le Chili importe la moitié des denrées alimentaires qu’il consomme) et de grandes inégalités qui affaiblissent sa consommation et sa cohésion sociale.

Malgré un ralentissement de son taux de croissance, le pays conserve de nombreux atouts : l’inflation y est maitrisée (2,8 % en 2017), le chômage, même s’il a légèrement augmenté, n’est que de 7 %, le déficit public est limité à 2,8 % du PIB et la dette publique à 24 % du PIB (contre 100 % du PIB en France). De plus, malgré la faiblesse des exportations de cuivre, le déficit de la balance des paiements est limité à 1,3 % du PIB. En d’autres termes, si l’économie chilienne a donné des signes de faiblesse, la probabilité d’une crise sérieuse reste très faible.

Sebastian Piñera a promis de dynamiser la croissance, mais peu de mesures concrètes ont été annoncées. Il a certes affiché sa volonté de revenir sur la hausse de l’impôt sur les sociétés de Michelle Bachelet qui ont été accusées de pénaliser l’investissement, mais il est peu probable que cela suffise à faire repartir l’économie du pays. Des mesures de long terme visant à élargir l’accès à l’enseignement supérieur (qui est très cher) et à augmenter l’investissement, tant public que privé, seront nécessaires pour permettre au pays de retrouver une croissance dynamique dans les années à venir.