Crédit immobilier : emprunter en devises étrangères reste risqué

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La filiale de BNP Paribas ayant commercialisé des prêts immobiliers en francs suisses en 2008-2009 vient d’être condamnée à une lourde amende et des dommages-intérêts. Cette  décision judiciaire met le projecteur sur les risques liés à l’emprunt dans une devise étrangère, lequel est plus encadré depuis quelques années.

Indemnisation des emprunteurs des prêts Helvet Immo

Une décision du tribunal correctionnel de Paris, rendue le 26 février 2020, a donné raison aux parties civiles représentant clients particuliers et associations de consommateurs qui avaient attaqué l’établissement financier devant la justice « pour pratique commerciale trompeuse ».

La banque est condamnée à l’amende maximale de 187 500 euros et également à verser des dommages et intérêts pour des montants qui devraient être très importants, pour environ 2 500 parties civiles. La banque peut faire appel de cette décision.

Dans cette affaire, BNP Paribas Personal Finance, filiale de BNP Paribas, avait commercialisé dans les années 2008/2009 des prêts immobiliers libellés dans la devise du franc suisse mais remboursables en euro, dénommés Helvet Immo, auprès de particuliers.

La clause indexant le prêt sur la valeur du franc suisse présentait le risque pour l’emprunteur qu’en cas de hausse du cours du franc suisse par rapport celui de l’euro, la charge de remboursement s’accroisse en proportion. C’est ce qui s’est passé, puisqu’en 10 ans, le cours du franc suisse a crû de + 50 % par rapport à l’euro.

Dans l’affaire Helvet Immo, la justice a reproché à l’établissement financier de n’avoir pas informé ses clients du « risque de change » et que ce risque de change était « à la charge exclusive de l’emprunteur ». Les emprunteurs continuent actuellement de rembourser leurs prêts dont le capital restant dû est supérieur au montant emprunté.

Encadrement des prêts immobiliers en devises

A la suite de cette affaire et de plusieurs autres similaires, le législateur a décidé de réagir en renforçant l’encadrement des prêts en devises commercialisés auprès des particuliers.

Depuis 2014, tout emprunteur particulier n’agissant pas pour des besoins professionnels doit en effet assurer sur son honneur ;

  • soit que la moitié au minimum de ses revenus annuels est perçue dans la devise concernée par le prêt,
  • soit que son patrimoine représente au moins 20 % du montant du crédit dans cette devise lors de la signature du prêt.

Articles L313-64 et R313-30 et suivants du code de la consommation.

Dans les faits, la législation s’applique surtout aux transfrontaliers, notamment de la Suisse.

L’emprunteur est considéré comme supportant le risque de change si la durée du crédit ou son échéance peuvent être affectées par des fluctuations de change. Une information sur les risques doit être explicite dans la fiche d’information standardisée européenne qui est toujours jointe à une offre de crédit immobilier.

En 2012 et 2015, de son côté, l’ACPR, régulateur du secteur bancaire, a publié deux recommandations sur le sujet des prêts en devises mais concernant plus spécifiquement les prêts à la consommation et les prêts non-immobiliers supérieurs à 75 000 euros.

Le respect de « bonnes pratiques » est recommandé aux professionnels, en termes de formation des conseillers, de communication et d’information auprès des clients – notamment une « information annuelle de l’emprunteur » -, des sanctions étant prévues en cas de non-respect.