Guerre en Ukraine : les banques françaises sont-elles exposées aux emprunteurs russes ?

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L’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février dernier a, d’ores et déjà, eu de nombreuses conséquences en matière économique. Parmi celles-ci : la forte baisse des cours en bourse des principales banques françaises devant les risques de pertes liées à une forte exposition à la Russie. Qu’en est-il vraiment ?

Les groupes bancaires français chahutés en bourse

À la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie le jeudi 24 février, les principaux marchés boursiers ont subi des pertes. Au cours des dix derniers jours, l’indice CAC 40, principal indice de la Bourse de Paris, a ainsi perdu plus de 6 %. Dans le même temps, les trois groupes bancaires figurant dans la composition de l’indice CAC 40 ont vu le cours de leurs actions chuter de plus de 15 % : Crédit Agricole (-17,8 %), BNP Paribas (-19,3 %) et Société Générale (-28 %).

Évolution des cours des valeurs bancaires à la Bourse de ParisLes grandes banques françaises ont donc davantage souffert que le marché – l’indice CAC 40 donnant un reflet de la tendance générale. Cela s’explique notamment par l’incertitude régnant autour de l’exposition des banques françaises à la Russie et par la mise en place de sanctions économiques fortes par le monde occidental. Celles-ci pourraient notamment provoquer des défauts de paiement de la part d’agents économiques russes et donc des pertes pour les établissements français.

L’irruption de la guerre en Ukraine vient ainsi accentuer la tendance baissière à la Bourse de Paris amorcée depuis janvier 2022 (l’indice CAC 40 avait atteint un record historique en clôture le 5 janvier).

Les banques françaises parmi les plus exposées à la Russie

Lors de chaque moment de crise, qu’elle soit de nature économique, financière ou politique, la capacité de résilience des établissements bancaires est scrutée avec attention. Les banques ne sont, en effet, pas des entreprises comme les autres. La complexité des opérations financières menées et l’opacité des activités bancaires rendent, en outre, difficile l’estimation des risques de pertes liées à la crise.

Il est toutefois possible d’avoir un aperçu de l’exposition directe de l’ensemble des banques françaises à la Russie. La Banque des Règlements Internationaux (BRI) publie, en effet, des statistiques sur les prêts bancaires par nationalité. Il apparaît, ainsi, que les banques françaises figurent parmi les plus exposées : au troisième trimestre 2021 (dernières données disponibles), elles disposaient de créances sur des emprunteurs russes pour un montant total de 25,2 milliards de dollars. Si les établissements français ont divisé par deux le montant des prêts accordés à des acteurs russes depuis l’annexion de la Crimée en 2014, ils restent parmi les plus importants créanciers derrière les banques italiennes et devant l’Autriche, les États-Unis et le Japon.Exposition des banques aux emprunteurs russesCes créances représentent donc un montant légèrement inférieur aux bénéfices enregistrés par les trois principales banques françaises en 2021 (24 milliards d’euros au total). Les conséquences du conflit entre l’Ukraine et la Russie ne présentent donc pas, à l’heure actuelle, de risque systémique pour les établissements bancaires français. Il convient toutefois d’être prudent, dans la mesure où les statistiques de la BRI ne nous renseignent pas sur l’exposition indirecte des établissements bancaires.

Le cas particulier de la Société Générale

La Société Générale est, à l’heure actuelle, la banque française la plus fortement touchée par les conséquences de la guerre en Ukraine. Cela s’explique notamment par l’importante présence de la banque en Russie, via sa filiale Rosbank. Cette banque russe est détenue à 100 % par la Société Générale. Disposant de 5 millions de particuliers et d’environ 87 000 entreprises comme clients, Rosbank était valorisée, fin 2021, à 3,2 milliards d’euros. C’est peu ou prou le montant de la perte que pourrait subir la Société Générale dans le pire scénario. Si le montant reste important, une telle perte ne devrait, toutefois, pas mettre en danger le groupe dont les bénéfices ont atteint 5,6 milliards d’euros en 2021.