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Connaissez- vous Zygmunt Bauman ?

Zygmunt Bauman est considéré comme un des grands sociologues de notre temps, insuffisamment connu dans notre pays. Deux de ses ouvrages les plus récents ont été publiés en 2008 et 2009. Une bonne occasion de le découvrir.

Zygmunt Bauman est né en 1925 à Postdam. Il a combattu dans l’armée Rouge et a enseigné la sociologie à Varsovie dans les années 1960. Il a été chassé de son pays par la vague antisémite du régime communiste polonais en 1968. Le Royaume Uni l’a accueilli. Il est devenu professeur de sociologie à l’université de Leeds et à celle de Tel Aviv. Depuis lors, livre après livre, il n’a de cesse de traquer la « question humaine » dans le monde moderne devenu selon lui, de façon quasi systémique, un monde de consommateurs et de décrire les dilemmes et les tensions des hommes et des femmes qui y vivent.

Zygmunt Bauman a forgé le concept de « modernité liquide » pour caractériser l’époque actuelle d’une mondialisation irréversible et d’une société de consommateurs par différence avec « la modernité solide » de la société industrielle. Pourquoi liquide ? Parce que notre société est celle du triomphe de l’éphémère, de la fragilité des liens et de l’incertitude. « L’homme sans qualité » avait été à juste raison identifié par le grand écrivain autrichien Robert Musil comme la figure type du monde moderne d’hier. Aujourd’hui, selon Zygmunt Bauman, notre contemporain est un « homme sans liens ».

Il n’y a chez lui aucune nostalgie de la modernité passée. Entre la double exigence humaine si contradictoire de liberté et de sécurité, la balance penchait terriblement du côté de la sécurité et d’une promesse de bien être dont la réalisation était toujours repoussée loin devant soi.

C’est ce monde moderne là qui a produit le totalitarisme et l’holocauste (voir à ce sujet son livre remarquable « Modernité et Holocauste »). Mais aujourd’hui, dans la modernité liquide, la balance penche nettement du côté de la liberté. Tout en est différent mais la modernité liquide reste un monde de tromperies et de frustrations. Les contradictions et les dégâts sont aussi considérables et les risques majeurs y compris ceux de nouveaux « meurtres catégoriels» sont toujours présents.

Lire Zygmunt Bauman n’est pas toujours facile. Ses propos sont denses et acérés. Le sociologue est aussi philosophe. Mais ce qu’il décortique renvoie directement à notre vie quotidienne. Et son écriture est prenante. Il sait manier l’aphorisme, l’humour d’Europe centrale et il est lui même un formidable lecteur qui cite les grands écrivains et les collègues avec une rare pertinence. La lecture de Zygmunt Bauman devrait donc intéresser au-delà d’un public d’érudits et notamment les enseignants de sciences économiques et sociales qui pourront y découvrir un vaste potentiel de documents pour la classe. Ils trouveront notamment dans « S’acheter une vie », une analyse de « l’homo consumens ». Ils pourront croiser ce regard aiguisé de sociologue avec « l’homo economicus » des économistes dont il constitue, à vrai dire, l’une des plus fortes critiques qui soit.

Aller plus loin :Les autres livres de Zygmunt Bauman Une émission de Canal Académie consacrée à Zygmunt Bauman Des conférences à l’Université de tous les savoirs

Lire aussi :L’éthique a-t-elle une chance dans un monde de consommateurs ? Editions Flammarion, collection Climats Août 2009, 296 pages, 23 €

 

 

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