Transformation digitale et frénésie financière

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Xerfi organisait le 5 avril 2018 une conférence sur le thème « Transformation digitale et frénésie financière ». L’occasion de revenir sur les enjeux économiques et financiers des transformations digitales actuelles.

Des intervenants de haut niveau

La conférence s’organisait en cinq temps.

L’ouverture était assurée par Laurent Faibis, président de Xerfi sur le thème de l’entreprise face à la mutation numérique, puis Ghislain Deslandes, professeur à ESCP Europe présentait les enjeux philosophiques entourant la « mutation » numérique.

Ensuite, Natacha Valla, cheffe de la division politique et stratégie à la Banque européenne de développement et Thierry Philipponnat, directeur de l’Institut Friedland, ont abordé les questions entourant les dérèglements de la finance et du tissu productif.

La conférence s’est poursuivie avec Frédéric Fréry, professeur à ESCP Europe, sur l’organisation des entreprises sous forme d’écosystèmes à l’ère digitale. Pierre Veltz, ingénieur et économiste a lui abordé le thème de la société hyper-industrielle.

Dans un quatrième temps, Elisabeth Grosdhomme, directrice générale de Paradigmes et cætera, et Philippe Askénazy, directeur de recherche au CNRS, ont présenté les enjeux liés à l’évolution de l’emploi du fait des évolutions technologiques, notamment dans le domaine du numérique.

Enfin, la question de la régulation et du rôle de l’Etat a été traité par Xavier Ragot, président de l’OFCE. Olivier Passet, directeur des synthèses de Xerfi a présenté, en guise de conclusion, les nouveaux équilibres financiers, économiques et sociaux imaginables.

Transformation digitale et frénésie financière

Quelques réflexions

Il serait illusoire de prétendre retranscrire ici l’intégralité des idées avancées par les intervenants. Nous ne présenterons que quelques idées qui nous ont semblé les plus marquantes.

Thierry Philipponnat a notamment présenté sa vision de la stratégie des GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) qui peut expliquer leur cours de bourse actuel. Selon lui, loin d’être des entreprises en concurrence, ces mastodontes visent en fait à acquérir chacun un monopole dans son secteur de façon à ensuite augmenter ses prix.

L’exemple d’Amazon est frappant. En effet, la capitalisation boursière de cette entreprise dépasse aujourd’hui 700 milliards de dollars. Or, rien dans son chiffre d’affaires ou son résultat (inférieur à 3 milliards de dollars en 2017) ne justifie une telle valorisation. Selon Thierry Philipponnat, le pari d’Amazon (et de ses actionnaires qui achètent ses actions à prix d’or) est qu’Amazon pourrait prochainement accroître son poids sur la distribution au point de devenir un quasi-monopole et qu’ainsi, l’entreprise pourrait augmenter ses prix et ses profits.

Le pari des investisseurs d’Amazon est non seulement que l’entreprise acquerra un monopole, mais aussi que les autorités de la concurrence ne feront rien pour le freiner.

Concernant le poids des GAFA, Frédéric Fréry pense qu’il ne faut pas les considérer comme des entreprises seules, mais comme des « écosystèmes ». En effet, ces entreprises ne se font pas concurrence comme, par exemple, Mc Donald’s et Burger King pour vendre des hamburgers, mais ce sont les écosystèmes qui sont en concurrence.

Google a créé un véritable écosystème avec, en plus de son moteur de recherche, son système d’exploitation Android, You Tube ou Google Earth.

De la même façon, Apple ne se résume pas à un seul produit mais à une variété de produits et de services associés (ordinateurs, téléphones, tablettes, montres, iTunes…).

La grande peur entourant la transformation digitale est celle d’une destruction massive d’emplois. En effet, des études récurrentes montrent que près de la moitié des emplois pourraient être automatisés dans les décennies à venir.

Elisabeth Grosdhomme a nuancé ce constat. En effet, les emplois présentent souvent plusieurs tâches et certaines sont automatisables mais d’autres pas. Certaines tâches vont disparaître, ce qui pourrait permettre de se concentrer sur d’autres. Seuls les métiers comportant une tâche unique, comme les caissières de supermarché, sont directement menacés par les nouvelles technologies.

Sans compter que ces nouvelles technologies seront aussi créatrices de nouveaux emplois et permettront des gains de productivité (donc de pouvoir d’achat). Dans l’ensemble, les intervenants ont pointé les défis technologiques, politiques et économiques à venir, mais aussi les très nombreuses opportunités.