Comment interpréter les chiffres du chômage ?
La question de la fiabilité des statistiques publiques est un sujet crucial puisqu’elle est à la base du débat démocratique. Les statistiques officielles du chômage, qui peuvent sembler contradictoires, doivent faire l’objet d’une attention particulière, d’où le thème d’une conférence organisée le mercredi 20 mars.
Étaient réunis pour débattre du sujet Thimothée Gidoin, co-fondateur de Datagora, Vincent Grimault, journaliste à Alternatives Économiques, Vladimir Passeron, chef du département de l’Emploi et des revenus d’activité à l’Insee et Marion Selz, présidente du Groupe Statistique et Enjeux Publics.
Tous les intervenants sont tombés d’accord sur l’importance de la diffusion de statistiques fiables auprès du grand public. C’est dans cette optique que Thimothée Gidoin a co-fondé Datagora ou que Marion Selz cherche à faciliter la compréhension des statistiques à travers les actions du Groupe Statistique et Enjeux Publics.
Le débat a longuement porté sur la définition et la mesure du chômage. Par exemple, Alternatives Economiques a créé un taux de non-emploi en équivalent temps plein pour les 25 – 60 ans. Cet indicateur permet notamment de prendre en compte les personnes qui n’ont pas d’emploi mais qui n’en cherchent pas et qui, de ce fait, ne sont pas prises en compte dans les statistiques du chômage.
La question a également porté sur la différence de mesure entre le taux de chômage calculé par l’Insee et celui calculé par Pôle emploi. L’écart est de taille puisque, selon l’Insee, la France compte environ 2,5 millions de chômeurs soit pratiquement un million de moins que les chiffres de Pôle emploi.
Vladimir Passeron a rappelé l’origine de cette différence : l’Insee définit le chômage selon les critères du Bureau International du Travail (ne pas travailler même à temps réduit, être disponible dans les 15 jours pour travailler, rechercher activement un emploi) alors que Pôle Emploi compte le nombre de personnes inscrites auprès de ses services.
Ainsi, une personne peut être inscrite à Pôle emploi sans être considérée comme au chômage par l’Insee, par exemple si elle n’est pas disponible dans les 15 jours.
La fiscalité pèse-t-elle trop sur le travail ?
Toujours le mercredi 20 mars, une autre conférence portait sur le niveau optimal de taxation du travail. Elle a réuni Benjamin Delozier, Sous-direction des politiques sociales et de l’emploi, François Ecalle, président du site d’analyse des finances publiques FIPECO et Sarah Perret, économiste fiscaliste à l’OCDE.
Sarah Perret a rappelé que la fiscalité totale sur le travail est particulièrement élevée en France. En effet, un salarié perçoit 52 % de ce qu’il a coûté à son employeur. Cela s’explique notamment par le haut niveau des cotisations sociales, qui représentent en France 37 % du total des recettes publiques, contre 26 % pour l’ensemble des pays de l’OCDE.
En revanche, l’impôt sur le revenu et la TVA sont plutôt inférieurs en France par rapport autres pays développés.
François Ecalle a résumé la situation française en rappelant que sur les trois assiettes fiscales que sont le travail, le capital et la consommation, la France, relativement aux autres pays, taxe plus le travail et le capital et moins la consommation.
S’il est impossible de calculer le « bon » niveau de taxation sur le travail, François Ecalle préconise une hausse de la taxation de la consommation (notamment la TVA) et une baisse de la taxation sur le travail et le capital de façon à renforcer l’attractivité du pays.
Plus spécifiquement, il faut distinguer la taxation du travail qualifié et du travail non-qualifié. Benjamin Delozier s’est montré favorable à une baisse des cotisations sur les bas salaires (les cotisations patronales sont inexistantes au niveau du SMIC) car baisser le coût du travail peu qualifié a plus d’impact sur l’emploi que la baisse des charges sur l’emploi qualifié.