Australie : La fermeture de Volt Bank, un mauvais présage pour le secteur des néo-banques ?

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Faute d’avoir réussi à mener à bien une nouvelle levée de fonds, la néo-banque australienne Volt s’est vue contrainte de cesser ses activités. Plus qu’un échec de l’entreprise, c’est le symbole d’un secteur qui n’a pas encore trouvé un modèle économique viable.

Le 28 juin 2022, Volt Bank, une banque en ligne australienne, annonçait sa fermeture à travers un communiqué : « Volt clôturera les comptes de ses clients à partir du 5 juillet, nous vous prions de retirer vos fonds afin de laisser la balance à 0 $ avant cette date. »

La disparition de la néo-banque Volt Bank

Fondée en 2017, Volt Bank était pourtant la première néo-banque australienne à obtenir une licence d’institution de dépôts auprès de l’APRA (l’autorité de régulation prudentielle australienne) en janvier 2019. D’ailleurs, de nombreux espoirs étaient fondés sur elle. En 2020, la start-up avait réussi à lever 50 millions de dollars australiens avant une nouvelle levée de fonds en série E de 100 millions de dollars australiens (environ 70 millions d’euros) en 2021.

Depuis le mois de février 2022, Volt espérait obtenir 200 millions de dollars australiens en série F afin de soutenir ses activités ; sans succès, la déconvenue a conduit l’entreprise à mettre la clef sous la porte.

Conséquence de cette fermeture, en plus des 140 employés qui se sont retrouvés sans emploi et de la perte de sa licence d’institution de dépôts, Volt Bank a dû rendre à ses 6 000 clients les 100 millions de dollars australiens qu’ils avaient au total déposés chez elle, de sorte que les déposants n’ont supporté aucune perte.

L’Australie, cas isolé ou exemple ?

En Australie, le secteur bancaire est dominé par quatre géants. Ces quatre banques détiennent environ 80 % du marché ; et la décision du régulateur australien d’accorder des licences aux néo-banques, pourtant destinée à limiter la concentration du secteur, n’a pas remis en cause cette hégémonie.

Depuis janvier 2019, trois autres néo-banques australiennes ont obtenu une licence de la part de l’APRA :

  • Xinja : à la suite des difficultés rencontrées durant la crise du coronavirus, la start-up a fermé en décembre 2020 ;
  • 86400 : la néo-banque a été rachetée par l’une des grandes banques australiennes, la NAB (National Australia Bank), elle a intégré le pôle « banque en ligne » de la banque connu sous le nom de Ubank ;
  • Judo Bank : avec la fermeture récente de Volt, Judo Bank est la seule néo-banque australienne en exercice parmi celles qui avaient reçu une licence.

Selon les acteurs du secteur, cet échec est lié d’une part à la crise du Covid-19, et d’autre part à la récente remontée des taux d’intérêt. Cette hausse des taux provoque une augmentation du coût de la dette. Cela conduit les investisseurs à exiger un retour sur investissement plus rapide. Ils se détournent des entreprises dont les perspectives de rentabilités sont trop éloignées dans le temps et privilégient des investissements moins risqués.

Si le secteur australien semble particulièrement affecté, ces difficultés sont présentes à l’échelle mondiale. Selon un rapport du cabinet de conseil Simon-Kucher & Partners, il y aurait environ 400 néo-banques en activités dans le monde, parmi lesquelles 95 % seraient déficitaires.

En France, malgré des efforts pour diversifier leurs sources de revenus, même Revolut ou N26 (qui ont toutes les deux obtenu une licence bancaire) affichent un résultat déficitaire sur l’année 2021 et dépendent donc des levées de fonds.

À quoi s’attendre dans les prochaines années ?

Avec la chute des cours et notamment des valeurs technologiques, la valorisation des fintechs est en chute libre ; à l’instar de la néo-banque brésilienne Nubank qui a perdu plus de 60 % de sa valeur depuis son introduction au Nasdaq en décembre 2021. En raison de cette tendance baissière, le leader américain Chime, qui avait prévu une introduction en bourse en 2022 a finalement décidé de la repousser.

Aussi, le constat est plutôt pessimiste pour les néo-banques. Une contraction du nombre de concurrents présents sur le marché paraît désormais inéluctable. Les premiers signes ne trompent pas, en juin 2022, le Crédit Mutuel Arkéa a annoncé vouloir fermer progressivement Pumpkin, la start-up concurrente de Lydia acquise en 2017.

Tant que la situation économique sera instable, les investisseurs seront frileux à l’idée de financer de nouveaux projets. Un casse-tête s’annonce pour les néo-banques qui doivent trouver un modèle économique viable tout en restant plus attractives que leurs concurrents bancaires traditionnels.