Comme chaque année, le Secours Catholique Caritas France (SCCF) a publié son rapport sur l’État de la pauvreté en France 2025. Dans cette édition, l’association caritative se penche sur « 30 ans de regard sur les pauvretés », depuis 1994, année où la lutte contre l’exclusion était déclarée « grande cause nationale » jusqu’à aujourd’hui.
Á partir des observations sur les situations de pauvreté multiples vécues par les 2, 7 millions de personnes et familles accueillies par ses antennes locales entre 1994 et 2024, l’association dresse dix principaux constats.
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Les 10 constats sur l’évolution de la pauvreté en France depuis 30 ans
La pauvreté s’accroit
Avec un taux de pauvreté de 15,4 % en 2023 représentant près de 10 millions de personnes, la France a atteint en effet un sommet depuis 30 ans. Sans la redistribution et les prestations sociales, la pauvreté grimperait à 21,7 % de la population, selon la Cour des Comptes. Même si ce taux se situe dans la moyenne européenne, la tendance est inquiétante : + 650 000 personnes pauvres en un an, là aussi, la plus forte hausse annuelle depuis 30 ans.
La pauvreté s’intensifie
Autre tendance récente, la pauvreté s’intensifie. Si le niveau de vie médian des ménages accueillis en 2025 est de 565 euros, ce chiffre est en forte baisse depuis 10 ans (658 en 2014). La hausse des taux de pauvreté et d’extrême pauvreté depuis 2017 a conduit à un accroissement du nombre de personnes accueillies sans aucune ressource. En 2024, 74 % vivent sous le seuil d’extrême pauvreté.
Les personnes pauvres sont d’abord des femmes et des enfants
Les personnes pauvres rencontrées sont d’abord des femmes et des enfants. Les femmes représentent 56,5 % des adultes et les enfants, 39 % des personnes soutenues par le SCCF. Près de la moitié (46 %) vivent avec des mères célibataires et plus d’un enfant sur cinq en 2024 vit dans un ménage sans aucune ressource, presque dix fois plus qu’en 1994.
Les personnes étrangères en situation de pauvreté
Les personnes étrangères sont en nombre croissant parmi les personnes accueillies. En 1994, ces adultes représentaient 20 % parmi les personnes accueillies, aujourd’hui, ils représentent plus de la moitié (52,7 %), principalement des femmes et des mères isolées. Cette situation s’explique aussi par la hausse du nombre de personnes en attente d’un titre de séjour ou sans papier.
Pauvreté et santé
La pauvreté est de plus en plus corrélée à l’état de santé. En effet, c’est la survenance de problèmes de santé qui explique de plus en plus le basculement dans la précarité. En 2024, 22,8 % des personnes accueillies déclaraient soit avoir des problèmes de santé, soit recevoir des prestations liées à une santé dégradé, soit être en situation de handicap. Ils n’étaient que 15,3 % en 1999.
Emploi et pauvreté
L’emploi ne chasse pas la pauvreté. Occuper un emploi ne protège pas forcément de la pauvreté. Si le nombre de personnes occupant un emploi ne représente que 17,9 % des personnes accueillies, il faut souligner leur niveau de vie très faible : 855 euros (contre 2443 euros pour la population générale), dont les trois-quarts dans des emplois précaires. Pour ceux et celles qui disposent d’un CDI, leur rémunération a par ailleurs baissé depuis 2017, passant de 1 126 euros à 1 110 euros.
Le chômage et la pauvreté
Le SCCF rencontre moins de chômeurs qu’avant, mais plus de personnes éloignées durablement de l’emploi : depuis dix ans, le taux de chômage des personnes accueillies a baissé de 44 % à 23,4%, en revanche les situations de chômage de longue durée ne cessent de croitre : en 2022, 65 % des chômeurs étaient sans droit à l’assurance chômage depuis au moins un an (+ 19 % en 25 ans), tandis que le nombre de personnes découragées par les difficultés d’accès à l’emploi et renonçant à chercher un emploi atteint 38 % (contre 28 % en 1999).
Les prestations sociales
Les prestations sociales ne touchent pas toujours leur cible. Ce constat est récurrent d’année en année : l’accès aux droits est de plus en plus difficile. Près de 4 personnes sur 10 éligibles au RSA n’y ont pas accès soit par méconnaissance, soit en raison de la complexité et de la dématérialisation des traitements. Ce non-recours touche surtout les hommes seuls, les pères isolés et les couples.
Les seniors et la pauvreté
La pauvreté ferait son retour parmi les seniors : bien que les plus de 60 ans et les retraités ne représentent que 7,3 % des personnes rencontrées (27 % de la population générale), le SCCF constate que leur part a pourtant triplé depuis 1999, particulièrement chez les femmes seules.
Pauvreté en milieu rural
Enfin, la pauvreté en milieu rural croit. Les personnes rencontrées vivant en zone rurale ne représentaient qu’une sur huit en 1994, trente ans plus tard, elles représentent plus d’une sur six, et cette proportion a doublé parmi les ménages français (32,4 % en 2024) avec une hausse marquée pour l’aide alimentaire.