3 février 1637 : l’éclatement de la crise de la tulipe

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La première bulle spéculative de l’histoire éclate en Hollande… en février 1637 ! En cause : une intense spéculation sur les tulipes. Récit de cet épisode au cours duquel des bulbes de tulipes s’échangeaient au même prix qu’une maison à Amsterdam.

La tulipe : un produit de luxe et un marché en expansion

Tout débute avec l’apparition de la tulipe en Europe vers la fin du XVIe siècle. La fleur aux couleurs vives est alors adoptée par les classes les plus aisées. Au début du XVIIe siècle aux Pays-Bas, un grand nombre de variétés de tulipes sont créées par des horticulteurs. Ils se servent en réalité de fleurs atteintes du potyvirus, une maladie contractée par les tulipes et qui change la couleur de ces dernières, afin d’obtenir de nouvelles espèces. Cependant, cette maladie complique la culture des plantes et de ce fait, certaines variétés sont très difficiles à faire pousser.

Jusqu’en 1634, le marché de la tulipe est semblable à celui du marché de l’art. Un milieu réservé aux plus aisés où le client passe commande à un horticulteur pour faire pousser la variété qu’il désire. La commande est passée à partir de l’automne lorsque les bulbes sont plantés, et le paiement se fait à l’été lorsque la fleur sort de terre et que le client est certain que ce qu’il achète correspond bien à ce qu’il avait commandé. Or, les tulipes qui attirent le plus sont les plus rares. La demande pour certaines espèces explose. On assiste alors aux prémices de la formation d’une bulle spéculative.

La formation de la bulle spéculative : crédit et marché à terme

À partir de 1635, plusieurs innovations financières accélèrent le développement de la bulle spéculative. L’innovation la plus importante est l’introduction des billets à effet. Ces derniers précisent les caractéristiques du bulbe et son prix. Ceci permet aux acheteurs de revendre un bulbe encore en terre, en échangeant non plus le bulbe lui-même mais le billet, un papier faisant office de titre.

Le marché des tulipes devient alors un marché à terme, c’est-à-dire un marché où le dénouement des opérations d’achats ou de ventes est différé dans le temps. Associé à l’essor du crédit, qui génère un effet de levier, ce développement du marché à terme provoque une forte hausse des prix, ce qui en retour attire de nouveaux participants à ce marché.

Le nombre de transactions augmente également et il n’est pas rare de voir un billet à effet, changer de mains à de multiples reprises avant la floraison de la tulipe. Les contemporains parlaient d’ailleurs de « windhandel », le commerce du vent.

L’éclatement de la bulle

Les sources fournissant l’évolution du prix des tulipes à cette époque sont rares. Le marché n’est pas régulé et il n’y a donc pas de cours officiel. En la matière, on doit composer avec les relevés de transactions ponctuelles retrouvés par les historiens. Il n’est donc pas possible de retracer avec précision l’ensemble des mouvements des cours pendant cette bulle spéculative.

Il apparaît toutefois qu’en janvier 1637, au sommet de la bulle, une tulipe pouvait valoir jusqu’à 15 années de salaire d’un artisan. Un bulbe de la variété Semper Augustus – la plus recherchée à l’époque – se serait même échangé pour 10 000 florins, soit l’équivalent de deux maisons en ville.

Le krach, c’est-à-dire l’éclatement de la bulle, se produit le 3 février 1637. Pourquoi ce jour-là en particulier ? Selon l’hypothèse la plus probable, le krach est déclenché par l’absence totale d’acheteurs ce jour-là lors d’une habituelle vente aux enchères dans une taverne d’Haarlem. Selon les historiens, les acheteurs ne se sont pas présentés à la vente en raison d’un épisode épidémique de peste bubonique. Cela a néanmoins suffi pour provoquer le retournement complet du marché : il ne faut que quelques heures pour que la nouvelle de l’absence d’acheteurs se propage à la ville entière et quelques jours pour que l’information atteigne l’ensemble des Provinces-Unies. Les bulbes de tulipes deviennent invendables, ou alors avec une décote de 95 % à 99 %.

Le marché n’étant ni organisé ni régulé, les transactions s’étaient faites sans garanties. Le 23 février 1637, une réunion nationale des horticulteurs décide que les ventes conclues après le mois de novembre 1636 seront annulées en échange d’un petit pourcentage du montant de la transaction conclue. En réalité, la majorité des contrats ont simplement été rompus, provoquant la faillite d’individus mal chanceux qui avaient investi au plus mauvais moment dans des contrats à échange immédiat.

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