Indicateur d’inégalité : le rapport interdécile

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La manière la plus simple d’aborder les inégalités économiques et leurs évolutions au sein d’un pays est de mesurer l’écart entre ce que gagnent les 10 % les plus riches et ce que gagnent les 10 % les plus pauvres (rapport interdécile). Bien qu’il souffre de limites, cet indicateur permet de mettre en évidence un recul des inégalités de niveaux de vie en France au cours de la période 1970-2000, puis une légère hausse concomitante à la crise des subprimes.

La construction du rapport interdécile

L’indicateur le plus simple pour étudier les inégalités de niveaux de vie est le rapport interdécile. Pour comprendre comment il est construit, un détour par le concept statistique de décile s’avère nécessaire.

Avant d’étudier toute distribution de salaires, de patrimoine, de niveaux de vie, etc., il est utile de l’ordonner de manière croissante. On appelle ensuite « décile » les valeurs qui partagent cette distribution en dix parts égales d’une population. Ainsi, pour une distribution de revenus, le 1er décile, généralement noté D1, est le revenu tel que 10 % de la population gagne moins. De manière similaire, le 9ème décile, ou D9, est le revenu tel que 10 % de la population gagne plus. Enfin, le 5ème décile, ou D5, correspond à la médiane de cette série.

Le rapport interdécile met en relation le 1er et le 9e déciles de la distribution des niveaux de vie mensuels et se calcule comme : D9 / D1. Selon l’Insee, le montant du 1er décile est, en France, en 2019, de 972 euros, tandis que celui du 9e décile est de 3328 euros. On obtient ainsi un rapport interdécile de 3,4 (= 3328 / 972). Cela signifie que les 10 % les plus riches ont un niveau de vie au moins 3,4 fois supérieur à celui des 10 % les plus pauvres.

L’évolution du rapport interdécile en France depuis 1970

Comme nous l’avons vu, la méthode de calcul du rapport interdécile est relativement simple. Cela permet de calculer cet indicateur de manière régulière et de pouvoir, ainsi, comparer son évolution au cours du temps. On peut distinguer deux périodes en étudiant l’évolution du rapport interdécile en France. Celui-ci diminue dans un premier temps, entre les années 1970 et le début des années 2000. Se situant juste sous la barre de 4,5 en 1970, le rapport interdécile atteint son niveau minimal, 3,3, en 2004. Cela suggère, du point de vue de cet indicateur du moins, que les inégalités de niveaux de vie ont reculé au cours de cette période. Ensuite, sous l’effet de la crise des subprimes, le rapport interdécile augmente légèrement. Il atteint, ainsi, 3,6 en 2011, un niveau inégalé depuis la fin des années 1970.

Le rapport interdécile permet également d’établir des comparaisons internationales. Selon cet indicateur, la France apparaît, en 2019, comme un pays légèrement moins inégalitaire, en termes de niveaux de vie, que la moyenne des pays de l’Union européenne et de la zone euro. À l’échelle européenne, la Slovaquie est le pays le plus égalitaire, avec un rapport interdécile de 2,7, tandis que la Bulgarie est la nation avec les plus fortes inégalités de niveaux de vie. Là-bas, les 10 % les plus riches ont un niveau de vie au moins 5,8 fois supérieur à celui des 10 % les plus pauvres.

Comparaison inégalité de niveau de vie en Europe

Les limites du rapport interdécile comme indicateur

Tout indicateur économique souffre de limites. Le rapport interdécile ne fait pas exception. En particulier, il ne tient pas compte de l’évolution des niveaux de vie au sein des groupes des 10 % les plus riches et des 10 % les plus pauvres. Or, des travaux économiques récents ont mis en évidence une très forte hétérogénéité, notamment au sein des ménages disposant des plus hauts niveaux de vie. Ainsi, si les 0,1 % des ménages les plus riches voyaient leur niveau de vie s’accroître fortement, le rapport interdécile pourrait rester inchangé, alors même que les inégalités augmenteraient mécaniquement.

Les limites du rapport interdécile dans la perception des inégalités a poussé les économistes et statisticiens à développer d’autres indicateurs, tels que l’indice de Gini, le rapport interquintile ou encore le ratio de Palma.

    2 commentaires sur “Indicateur d’inégalité : le rapport interdécile”
    1. Bonjour,

      En fin d’article vous discutez de la très forte hétérogéniété au sein des ménages découvert par de récents travaux économiques, de quels travaux économiques faites vous référence ?

      Merci,
      Gautier

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