Quelles informations comptables rechercher lorsqu’on est actionnaire ?

la finance pour tous

Cette vidéo a été tournée en 2009, mais elle reste d’actualité. Sophie Baranger est désormais directrice des enquêtes et des contrôles de l’Autorité des marchés financiers.

Que l’on soit actionnaire ou qu’on envisage de le devenir, il est utile de s’informer sur la société dans laquelle on investit, tout particulièrement sur ses comptes. Mais comment s’y retrouver dans des documents souvent volumineux et complexes ?

Sophie Baranger, Directrice des affaires comptables de l’AMF, analyse les principales informations comptables que les actionnaires- ou ceux qui veulent le devenir – ont intérêt à connaître.

Actionnaires : quels indicateurs regarder dans les comptes ?

Il faut toujours avoir à l’esprit que les différents indicateurs seront variables d’une entreprise à l’autre, d’un secteur à l’autre. Par exemple, l’importance des actifs d’une institution financière, en particulier de ses actifs corporels, sera très différente de celle d’une entreprise industrielle ou d’une entreprise commerciale.

  • Au niveau du compte de résultat, trois grandeurs donnent une première idée de la performance d’une société cotée : le chiffre d’affaires, le résultat opérationnel – ou une donnée équivalente qui peut être la marge brute ou la Marge opérationnelle – et le résultat net.

  • Les principales grandeurs à examiner pour apprécier la situation financière d’une société cotée sont : les capitaux propres, c’est-à-dire les contributions que les actionnaires ont versées, augmentées de la richesse accumulée sous forme de réserve au sein de ces fonds propres. Le niveau des fonds propres est une donnée importante en tant que telle mais aussi en tant que donnée relative, si on la rapporte au niveau de l’endettement de la société. Le ratio d’endettement ainsi calculé est en général assez homogène d’une entreprise à l’autre pour un secteur donné d’activité. Une autre donnée importante à considérer est celle du ratio des fonds propres par rapport aux écarts d’acquisition. En effet, dans les comptes des sociétés, les écarts d’acquisition ne sont en général pas amortis. Leur valeur est fonction des évolutions des perspectives de résultats futurs de l’entité. En fonction de celles-ci, on peut avoir des dépréciations à constituer qui peuvent avoir un impact d’autant plus important que le montant des écarts d’acquisition est lui même élevé par rapport aux fonds propres.

  • Le tableau des flux de trésorerie permet d’avoir une bonne idée de la façon dont les flux de trésorerie (en anglais cash flow) sont générés par l’activité de la société. Ceux-ci constituent un gage de la solidité financière de l’entreprise puisqu’ils permettent de rémunérer les actionnaires et l’ensemble des créanciers de la société considérée. On pourra examiner en particulier quels flux de trésorerie sont générés par l’activité opérationnelle et quelle en est l’évolution dans le temps ; quels sont les flux de trésorerie générés ou consommés par l’activité de financement ; quels sont les flux de trésorerie consommés ou générés par l’activité d’acquisition et d’investissement au sens large du terme.

Quels documents examiner particulièrement dans les comptes des entreprises ?

Dans la documentation très volumineuse fournie par les sociétés cotées, certains documents permettent plus particulièrement d’aller à l’essentiel.

  • Dans les documents de référence publiés par les sociétés cotées, celles-ci décrivent dans le chapitre « facteurs de risques » les principaux risques auxquels elles sont exposées. Elles établissent les liens et les renvois vers les comptes et les annexes aux comptes dans lesquels ces risques sont expliqués et quantifiés.

  • Dans les annexes aux comptes, trois chapitres fournissent des commentaires particulièrement importants :– Dans celui concernant les politiques comptables clés, la société décrit les principaux traitements comptables indispensables à une bonne compréhension des comptes, tels que par exemple la description du périmètre de consolidation.– Un autre chapitre décrit les principaux jugements et les principales estimations retenues par la direction dans le cadre de l’élaboration des comptes. Ainsi par exemple, si la société possède des marques ou des écarts d’acquisition, celles-ci ne sont pas comptabilisées par une valeur donnée par le marché, mais par des valeurs internes élaborées par la direction, dont il est important de connaitre la méthode.– Un troisième chapitre très utile est celui qui décrit les faits et les transactions importantes intervenues durant l’exercice, ayant un impact sur l’ensemble des postes du bilan et des comptes de résultat, telles que des cessions ou des acquisitions majeures.

  • Le rapport de gestion publié à l’occasion des comptes annuels contient lui aussi une description des faits et transactions principaux ainsi qu’un chapitre de commentaires de la direction sur les comptes publiés.

  • Enfin le rapport du ou des commissaires aux comptes fournit le jugement de ceux-ci sur les comptes publiés. Dans la plupart des cas ils certifient que les comptes sont réguliers, sincères et qu’ils fournissent une image fidèle de la situation comptable. Dans certains cas, le rapport apporte des mentions additionnelles spécifiques (par exemple une réserve émise sur un traitement comptable effectué) ou des observations qui ont justement pour objectif d’attirer l’attention des actionnaires actuels ou potentiels sur tel ou tel point particulier. Dans son rapport, le commissaire aux comptes se doit également de justifier les principaux jugements portés dans le cadre de l’audit qu’il a effectué.

Attention aux normes comptables

Deux référentiels comptables cohabitent. Les comptes sociaux de la société mère du groupe qui permettent de déterminer les dividendes ou le résultat imposable doivent être établis conformément aux règles comptables françaises. Parallèlement, lorsque les titres du groupe sont cotés sur un marché réglementé, le groupe a, depuis 2005, l’obligation de publier ses comptes consolidés en normes comptables internationales (dites IFRS). Celles-ci, élaborées par un organisme privé installé à Londres, l’IASB, ont été reconnues par le législateur via un Règlement européen. Or il existe certaines divergences entre les deux référentiels. Par exemple les règles françaises exigent que les écarts d’acquisition soient amortis alors que les normes IFRS l’interdisent. Il faut donc être conscient de ces différences qui peuvent être source de confusion pour le lecteur des comptes.

Les recommandations de l’AMF

Chaque année l’Autorité de Marchés Financiers publie des recommandations aux sociétés cotées en vue de l’arrêté de leurs comptes annuels. Ces recommandations sont nourries, d’une part par l’actualité et d’autre part par les contrôles effectués chaque année sur les comptes de quelques 140 sociétés – ce qui permet de faire ressortir des points pas toujours bien traités ou des informations importantes requises mais pas toujours données.

Le millésime 2009 des recommandations a été publié le 4 novembre 2009. Il est consultable sur le site de l’AMF. Les principales recommandations concernent des sujets liés à la crise financière que nous traversons depuis 2 ans. Elles reviennent par exemple sur les risques liés aux instruments financiers (risque de crédit et risque de liquidité) ou sur la question particulièrement sensible juste valeur des instruments financiers, notamment sur la façon dont ces instruments doivent être évalués en l’absence de cotation sur un marché actif. Au total les recommandations 2009 de l’AMF traitent d’une dizaine de sujets parfois assez complexes que l’épargnant non professionnel aura parfois du mal à maitriser. Mais la consultation de la liste des questions traitées lui permettra en tout été de cause d’identifier les points sur lesquels il devra être particulièrement vigilant lors de la publication des comptes annuels des sociétés qui interviendra au plus tard 4 mois après la clôture annuelle des comptes, c’est-à-dire au plus tard en avril pour les sociétés qui ont arrêté leurs comptes au 31 décembre 2009.

    3 commentaires sur “Quelles informations comptables rechercher lorsqu’on est actionnaire ?”
    1. Bonjour,

      Merci pour votre lecture attentive et vos suggestions.

      Meilleures salutations.

      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    2. Ces éclairages sont très utiles pour les consommateurs de l’information financière.
      On pourrait ajouter dans le package d’ informations livrables aux investisseurs, les indicateurs de performance clés (ou contreperformance) propres à chaque secteur ou domaine d’activité.
      En clair, la construction d’indicateurs (économique ou financier) de mesure propres à chaque corps de métier et standardisé améliorerait la lecture et la compréhension des informations sur la vie du microcosme économique.

3 commentaires

Commenter