Les cycles financiers

la finance pour tous

Cet article et l’ensemble de ceux composant ce dossier consacré à la crise des subprimes ont été rédigés entre 2008 et 2010. Ils doivent être considérés en se plaçant dans le contexte de l’époque.

L’activité financière évolue généralement par cycles, les périodes d’expansions étant suivies de suivies de ralentissements, voire de crises, comme cela a été le cas en 2007-2008.

L’origine de la perturbation, les défaillances de la régulation, les mécanismes de la contagion financière et économique sont différents d’une crise à l’autre. Mais toutes ces crises financières qui jalonnent l’histoire du capitalisme, ont des dimensions communes.

Origine d’une crise : Néoclassiques versus Keynésiens

En économie, il existe principalement deux conceptions d’une crise propres à chaque courant de pensée :

– Pour les Néoclassiques, elles sont dues à des chocs exogènes, qui, selon leur impact sur des « marchés efficients » (c’est-à-dire des marchés efficaces, autorégulés, où l’information circule parfaitement) nécessitent un réajustement plus ou moins brutal.

– Pour les Keynésiens, elles sont dues à des chocs endogènes, c’est-à-dire inhérents au système financier, par définition instable. Les comportements des agents économiques y opérant ne sont pas rationnels (comportements mimétiques par exemple) et l’information n’y circule par parfaitement. Les crises sont récurrentes et présentent des caractéristiques communes : on parle alors de cycle financier.

Nombreux sont les économistes qui se sont intéressés aux phénomènes de cycle : John Maynard Keynes, Hyman Minski, John Kenneth Galbraith, Charles Kindleberger ou plus récemment Paul Krugman et Michel Aglietta.

Selon ces économistes, Il n’y a pas simplement une répétition des crises, mais une répétition de cycles financiers, dont la crise constitue l’un des moments.

Charles Kindleberger (1910-2003), historien économique américain  constate  l’existence de cycles dans la sphère financière en s’appuyant sur l’étude des grandes crises de l’Histoire. Selon lui, un cycle financier se décompose en cinq phases : 

  • l’essor,

  • l’euphorie,

  • le paroxysme et le retournement,

  • le reflux (et l’instauration du pessimisme) et enfin

  • la déflation de la dette (et la restructuration des bilans).

Il est possible de rapprocher cette théorie avec le déroulement de la crise financière de 2007-2008.

Cycles financiers

Phase 1 : essor

La phase d’essor se caractérise par une croissance économique après un ralentissement ou une récession. Cette phase de croissance peut être générée par une innovation, un changement technologique ou institutionnel ou encore alimentée par un investissement productif. Cette croissance engendre une expansion du crédit (anticipations optimistes de la conjoncture par les agents économiques) qui favorise une hausse du prix des actifs.

Cette phase aurait débuté au début des années 1990 aux États-Unis où l’on constatait un essor de l’octroi de crédits et une phase d’innovation et de libéralisation financière qui s’est traduite par une complexification des produits dérivés et de titrisation, notamment ceux adossés aux crédits accordés aux ménages américains.

Phase 2 : euphorie

Cette phase se caractérise par un cercle auto-entretenu entre emballement du crédit et hausse du prix de certains actifs. Les risques sont sous-évalués, ce qui aggrave la fragilité des structures financières. 

C’est ce que l’on a observé avant le déclenchement de la crise des subprimes. Les crédits consentis aux ménages américains étaient sur-évalués par rapport à leur capacité de remboursement et donc le risque sous-évalué. Autrement dit, trop de crédits ont été accordés et les prix des titres  financiers adossés à ces créances ne reflétaient pas la réalité du marché.

Phase 3 : paroxysme et retournement

Cette phase est un point de retournement, le passage d’une période d’euphorie à une période de décroissance. Les anticipations des agents économiques se renversent. Après une période de hausse régulière, on assiste à une chute brutale du prix des actifs.

Phase 4 : reflux et pessimisme

Cette phase correspond ici au début de la crise. Les prix des actifs baisse brutalement.

La crise est d’abord le point de retournement, le passage d’un moment d’euphorie à un moment de décroissance. Par abus de langage, la crise correspond aussi à la période entière de reflux.

Phase 5 : Déflation de la dette et restructuration du bilan 

Cette phase est marquée par :

  • Une déflation de la dette et une restructuration des bilans.

  • Les investisseurs surendettés doivent se désendetter. Ils peuvent être contraints de vendre leurs actifs pour faire face à leur besoin de liquidité, déclenchant une spirale de baisse auto-entretenue du prix de ces actifs et un assèchement de la liquidité. Cette situation se propage de marché en marché, d’un continent à l’autre. Ce phénomène de contagion contraint les banques à resserrer leur offre de crédit.

  • La dépense privée se contracte (volonté de désendettement de la part des agents) et pèse sur les revenus et donc sur la croissance qui finalement freine le désendettement.

Le désendettement se réalise beaucoup plus lentement que la chute des prix des actifs, ce qui entraîne de nombreuses faillites.

C’est ce que l’on a constaté pendant l’été 2008, Fanny Mae et Freddy Mac, les deux plus grandes institutions américaines de financement de crédit immobilier étaient au bord de la faillite. Début septembre, le Trésor américain a annoncé leur mise sous tutelle gouvernementale. Une semaine plus tard, c’est au tour de Lehman Brothers, la deuxième plus grosse banque d’investissement des États-Unis de se déclarer en faillite le 15 septembre 2008.

Cette crise, qu’on pensait propre au système financier, se propage à l’économie. Ainsi, en 2009, les États-Unis et la plupart des États membres de la zone euro entrent en récession.

    6 commentaires sur “Les cycles financiers”
    1. Bonjour, je me permets de vous écrire ce commentaire car je souhaiterais vous poser une question. Selon vous, quel facteur explique principalement l’augmentation des déficits publics en Europe suite à la crise des subprimes ? Je ne sais pas si c’est une baisse marquée des recettes publiques ou une hausse marquée des recettes publiques ou une hausse marquée des intérêts de la dette ou une hausse des dépenses publiques ?

      1. Bonjour,
        Dans le cas de la France, le creusement du déficit public au début des années 2010 s’explique par une augmentation plus rapide des dépenses publiques que des recettes publiques. Vous pouvez le vérifier dans les données publiées par l’INSEE et disponibles à l’adresse suivante : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381414#tableau-figure1
        Meilleures salutations,
        L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    2. Les arcanes de la finance et leurs désastreuses conséquences… Les Etats doivent se concerter pour mettre des gardes-fou à ce dangereux système avant qu’il ne signe le déclin de l’humanité.

6 commentaires

Commenter