Les limites à la création monétaire

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Les banques commerciales ne peuvent octroyer autant de crédits ni créer autant de monnaie qu’elles le veulent. En effet, il existe deux limites à leur activité de prêts aux agents économiques : la réglementation prudentielle et la politique monétaire de la Banque centrale.

Réglementation prudentielle

La réglementation prudentielle est destinée à éviter que les banques ne prennent trop de risques et finissent par faire faillite. En effet, si la situation financière d’un client est irrémédiablement compromise, le prêt que la banque lui a consenti risque de ne pas être remboursé.

Dans ce cas, la banque devra combler son manque de liquidités en empruntant aux autres banques les montants non remboursés et devra enregistrer une perte comptable correspondant à la partie du crédit non remboursée.

Si trop de clients de la banque ne peuvent rembourser leurs emprunts, c’est la banque elle-même qui se retrouve dans une situation difficile. Compte tenu des liens de financement entre les banques, qui se prêtent mutuellement, les difficultés d’une banque peuvent se transmettre à l’ensemble du secteur bancaire.

C’est pourquoi les réglementations dites prudentielles imposent aux banques des limites dans le montant total de leurs engagements. En particulier, elles doivent respecter un ratio de solvabilité rapportant le montant total de leurs fonds propres à leurs engagements au moins égal à 10,5 % (avant Bâle 3, ce ratio était fixé à 8 %).

Si une banque détient 100 € de fonds propres, elle ne pourra prêter plus de 952,38 €.

Par ailleurs, les banques sont tenues de mettre en place des procédures de contrôle interne destinées à leur permettre d’apprécier la capacité de remboursement des demandeurs de crédit et limiter ainsi les risques de défaut de paiement.

Politique monétaire

La deuxième limite à la création monétaire vient de la politique monétaire. Le rôle de la banque centrale est de gérer la quantité de monnaie en circulation dans l’économie (ce qu’on appelle la masse monétaire) de façon à ce qu’elle soit adaptée aux besoins des agents économiques.

La banque centrale doit s’assurer qu’il y ait suffisamment de monnaie dans l’économie mais pas trop non plus. Il faut éviter à la fois la récession et l’inflation.

Dans la zone euro, c’est la Banque centrale européenne (BCE) qui régule la quantité de monnaie en circulation. Elle est indépendante des États et des autres institutions européennes. La BCE a un objectif d’une inflation moyenne de 2 %.

    86 commentaires sur “Les limites à la création monétaire”
    1. Réponse à Ahmed

      Le Trésor Public gère les comptes de l’Etat. Il dispose pour cela d’un compte à la banque centrale. Si celle-ci accepte de créditer le compte du Trésor public du montant du déficit budgétaire, l’argent ainsi créé par la banque centrale va servir à payer les fonctionnaires et les créanciers de l’Etat. C’est ainsi que se déverse dans l’économie la monnaie créée par la banque centrale. On appelle ce procédé « faire fonctionner la planche à billets ». Ses statuts interdisent à la BCE de l’utiliser.

      Meilleures salutations.

      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    2. Bonjour,

      Il est pertinent de comparer le montant de la consommation des ménages et celui des crédits à la consommation. Le sous-gouverneur de la Banque de France précisait par exemple en 2009 au cours d’un colloque à l’Assemblée Nationale que les crédits nouveaux à la consommation représentaient en 2008 5 % de la consommation des ménages. Or, les crédits nouveaux sont plus restrictifs que les encours de crédits qui englobent effectivement le stock des anciens crédits non intégralement remboursés en plus des nouveaux. Avec des encours des crédits à la consommation représentant moins de 10 % de la consommation des ménages en 2014, on est donc très au-dessus de la réalité.
      Plus récemment, le rapport 2015 de l’Observatoire des crédits aux ménages indique que depuis 2009 le taux de détention des crédits à la consommation recule pour s’établir à 25,6 % en 2014 (soit un ménage sur 4) et que les ménages utilisent ces crédits surtout pour réaliser des projets de consommation durable ou d’amélioration des logements. En d’autres termes, le crédit n’est à la source que d’une partie de l’argent en circulation dans l’économie.

      Enfin, l’intérêt se justifie de deux façons : d’une part, il rémunère le service rendu par la banque qui met à disposition de son client des fonds qui lui permettent d’acheter immédiatement un bien sans attendre des mois ou des années d’en avoir les moyens. D’autre part, l’intérêt comprend aussi la rémunération du risque de non remboursement du prêt.

    3. Bonjour,

      Je me pose la même question que jean4240 et gribichex et, aussi intéressantes vos réponses soit-elles, elles ne répondent pas exactement à la question. Permettez-moi de la reformuler.

      Si la _totalité_ de l’argent en circulation provient, à un moment ou à un autre, d’emprunts réalisés auprès des banques par les agents économiques (particuliers, entreprises, états, etc.) et que les banques demandent, en plus du remboursement de l’emprunt, le paiement d’un intérêt, alors il y a sur le marché suffisamment d’argent pour rembourser les emprunts (au centime près) mais pas pour payer les intérêts qui s’y ajoutent. D’un point de vue macro-économique, pour être en mesure de payer ces intérêts, il y a deux solutions : soit une partie des emprunts ne sont pas remboursés (certains agents font défauts) de manière à libérer des liquidités qui serviront à payer les intérêts des autres, soit il faut emprunter de nouveau pour payer les intérêts, nouveaux emprunts qui appelleront eux-même de nouveaux intérêts, et ainsi de suite.

      Du coup, la question porte sur le bienfondé d’un système économique qui, par conception, requière qu’une partie des agents économiques fassent défaut (et, dans le même temps, perdent possessions et souveraineté) et/ou que les intérêts produisent eux-même des intérêts, ce à l’infini, jusqu’à ce que la totalité de la production de valeur se concentrés dans les actifs des banques. Ou, posée plus directement, la question est : quel est la légitimité de l’intérêt sur l’argent empruntés ?

      Par ailleurs, permettez-vous de souligner que, dans votre dernier commentaire, vous comparez deux valeurs qui ne sont pas comparables. D’un coté, la consommation des ménages est un flux (chaque euro en circulation y sera comptabilisé plusieurs fois dans l’année, à chaque fois qu’il passera de la main d’un particulier à celle d’une entreprise), tandis que l’encours des crédits à la consommation est un stock (chaque euro n’y est comptabilisé qu’une seule fois). Il n’est donc pas possible de tirer la moindre conclusion en comparant ces deux valeurs.

      Pour en revenir à la question initiale, je vous avoue en chercher la réponse depuis un moment, mais sans succès jusqu’à présent. J’espère que vous saurez alimenter mon moulin.

      Cordialement.

    4. Bonjour,

      Effectivement, les revenus de l’activité de l’entreprise (son chiffre d’affaires) provient de ses clients. Dans certains cas, ces derniers devront eux-mêmes emprunter pour financer leur achat (cas par exemple des particuliers qui achètent un logement ou d’une entreprise qui investit dans une nouvelle machine). Mais pour les achats de consommation courante, le financement s’effectue principalement par recours au revenu ou à l’épargne. Prenons par exemple la consommation des ménages en France en 2014, elle se monte à 1517 milliards d’euros selon l’Insee. En regard, les chiffres de la Banque de France indique que l’encours des crédits à la consommation a atteint 146,3 milliards d’euros en décembre 2014, soit à peine 10 % du montant de la consommation des ménages.
      Meilleures salutations.

      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    5. Dans votre dernière explication quelque-chose m’échappe : Vous dites que la différence entre les revenus issus de l’activité d’une entreprise et ses dettes constitue la création de valeur qui explique qu’on aboutit pas à des défaut de remboursement des intérêts des crédits. Or les revenus de l’entreprise en question provient bien de ses clients non ? Et cet argent provient bien à la source d’un crédit comme le disait jean4240 ?

    6. Bonjour,

      Lorsqu’une entreprise emprunte, elle le fait pour investir dans son activité. Comme elle crée de la valeur et dégage du profit, les remboursement de ses dettes sont inférieurs au revenus tirés de ses activités. Donc au final, elle a certes emprunté (aux banques, aux marchés financiers ou à ses actionnaires), mais elle retire plus de revenus qu’elle n’en dépense pour rembourser ses dettes. Entre temps, elle aura payer ses fournisseurs, ses employés, l’Etat.

      Par ailleurs, le rôle d’une banque centrale est entre autres, de fournir la quantité de monnaie nécessaire au bon fonctionnement de l’économie. C’est à dire que la quantité de monnaie disponible (on parle de la masse monétaire) doit permettre aux agents de régler leurs achats ou leurs dettes et ainsi de faire fonctionner l’économie. Si la banque centrale met trop d’argent à disposition des agents économiques par rapport à leur besoins, alors cela crée de l’inflation (perte de pouvoir d’achat de la monnaie car elle est surabondante), si elle n’en met pas assez à disposition, alors cela crée des tensions car tous les produits ne peuvent être vendus faute de monnaie en quantité suffisante. On risque la déflation qui est une baisse des prix généralisée.

      Donc, à tout moment, la banque centrale s’assure que la monnaie disponible pour le bon fonctionnement de l’économie est en quantité appropriée. C’est pour cela qu’elle dispose du monopole de fabrication des billets et de la définition de la politique monétaire.

      L’Etat peut être en déficit budgétaire, comme c’est le cas un peu partout dans le monde. Mais il se finance sur les marchés financiers mondiaux qui acceptent de lui prêter. En fait, il s’agit d’une affectation de l’épargne des agents en excédents budgétaires, et non d’agents qui empruntent pour prêter à leur tour. Il n’y a pas création monétaire, sauf si la banque centrale finance directement le déficit budgétaire car dans ce cas, la banque centrale fait comme une banque commerciale avec un client : elle crédite le compte de l’Etat dans ses comptes et le tour est joué. C’est pourquoi, pour éviter le laxisme budgétaire des Etats et la dérive inflationniste qui en découle, cette pratique est encadrée, voire interdite pour la BCE.

      Le système est donc le suivant :

      les agents économiques créent de la valeur par leur activité. Ils en tirent des revenus supérieurs au montant des dettes qu’ils remboursent. Ce faisant, ils génèrent des besoins de monnaie en quantité croissante que la banque centrale est chargée de combler sous réserves d’éviter l’apparition de tensions inflationnistes ou déflationnistes. La création monétaire et la politique monétaire répondent à ce double impératif.

      Par ailleurs, l’activité de prêt est une activité spécifique, certes, mais c’est aussi un service très important pour l’économie. En permettant aux agents qui n’en ont pas les moyens d’acquérir des biens qu’ils ne pourraient pas se procurer autrement, ou au terme d’une longue période d’épargne, les banques jouent un rôle central qui justifie que leur activité soit régulée. Mais elles exercent également une activité commerciale et il est normal qu’elles soient rémunérées pour cela via les taux d’intérêt.

      Enfin, créer de la monnaie sans contrepartie (distribuer de l’argent) conduit tout droit à la faillite généralisée car trop d’argent circulant dans l’économie par rapport à la quantité de biens et services disponibles, il s’ensuit de l’hyper inflation (hausse très forte du niveau général des prix) néfaste pour l’économie (perte de pouvoir d’achat des ménages, chute des exportations, absence d’investissements des entreprises, perte de confiance dans la monnaie)

      Meilleures salutations.

      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    7. merci beaucoup de votre éclairage; un point demeure toutefois mystérieux pour moi : « Donc, ils utilisent l’argent qu’ils touchent mensuellement en provenance d’autres acteurs économiques qui eux-mêmes perçoivent des revenus issus de leurs activités et non d’un emprunt ».

      Certes, les autres acteurs économiques disposent de monnaie issue de leur activité; mais d’où vient cette monnaie si ce n’est d’un emprunt ?

      A un moment ou à un autre, la monnaie dont il s’agit a été mise en circulation. Elle est donc attachée à une dette de remboursement qui comprend le capital et des intérêts, donc un montant supérieur à celui de la monnaie mise en circulation à cette occasion. Je suis moi même employeur. l’argent que je verse à mes salariés (leur revenu) provient de l’argent que me verse mes clients. Mes clients tirent ces revenus de leur propre activité etc…si on remonte jusqu’à la source de cette émission de monnaie, on tombe sur un emprunt et une dette de remboursement d’un montant supérieur à la monnaie mise en circulation; en ce compris la monnaie issue du salaire des fonctionnaires ou plus généralement de la dépense publique, puisque l’Etat ne crée plus lui même de la monnaie mais emprunte…ou collecte l’impôt, c’est à dire de la monnaie issue à un moment ou à un autre d’un emprunt…si j’applique ce mode de fonctionnement à l’échelle de mon budget domestique, on me dira que je fais de la cavalerie (je finance le remboursement de l’emprunt par de l’emprunt…ce n’est pas très bon, parce que j’augmente la charge de remboursement jusqu’à me trouver en surendettement).

      Comment ce système peut il fonctionner à l’échelle macro économique sans créer une tension (certains pourront rembourser, d’autre pas…) puis une explosion avec obligation à un moment d’annuler une partie de la dette ? et, du coup, comment légitimer le lien entre émission de monnaie et création d’une dette globalement impossible à rembourser en totalité ? sauf à ce que les intérêts perçus par les établissements bancaires soient intégralement remis dans le circuit de l’économie réelle, ce qui ne me semble pas être le cas, je ne comprends ni sa viabilité ni, du coup, sa légitimité; autrement dit, la création monétaire peut elle réellement être considérée comme une activité économique comme les autres, alors qu’elle permet l’activité économique tant que sa masse en circulation est en adéquation avec les services et biens offerts à l’échange ? du coup tarir mécaniquement la masse de monnaie en circulation, en créant une « fuite » permanente dans le circuit des échanges, me semble déraisonnable. merci de me dire si je fais erreur quelque part, mais je voudrais comprendre si nous traversons une crise (quelque chose qui manifeste une croissance, avec des tensions et des ajustements passagers) ou si nous butons sur les limites intrinsèques de notre système de création monétaire, ce qui devrait nous orienter alors non pas vers une utilisation plus performante des outils existants (relance par le crédit, relance par la consommation…) mais par un changement d’outil (par exemple émission de monnaie sans dette d’intérêts associée, voir sans dette du tout).

    8. Bonjour,

      La création de monnaie passe par les banques commerciales. Pour ce faire, elles créditent simplement le compte de leurs clients de la somme empruntée. Les clients remboursent périodiquement (généralement tous les mois) une fraction du capital et des intérêts. Mais pour cela, ils utilisent leurs revenus (salaires, prestations sociales, revenus de capitaux ou locatifs) qui proviennent de débiteurs ou de leur employeur. Donc, ils utilisent l’argent qu’ils touchent mensuellement en provenance d’autres acteurs économiques qui eux-mêmes perçoivent des revenus issus de leurs activités et non d’un emprunt.
      Entre temps, l’argent emprunté aura servi à financer un achat et donc aura été utilisé dans le circuit économique. C’est ainsi qu’au niveau global on peut réactiver la croissance économique par le crédit. En incitant les acteurs économiques à emprunter, on favorise la consommation, donc l’activité des entreprises (nationales mais aussi étrangères). C’est ce que cherche à faire aujourd’hui la Banque Centrales Européenne avec sa politique très accommodante (taux d’intérêt directeurs proches de zéro notamment).

      Meilleures salutations.

      L’Equipe de Lafinancepourtous.com

    9. Bonjour. Merci pour ce site passionnant et les efforts pédagogiques qui le sous-tendent. Quelque chose m’échappe dans le processus de création monétaire. Si l’émission de monnaie s’accompagne d’une dette de l’emprunteur, qui doit rembourser le capital et les interêts : cela signifie qu’après remboursement le capital est détruit et les interêts sont retirés des échanges. Pour payer ces interêts l emprunteur a du percevoir de la monnaie d’un autre acteur économique qui lui même tient cette monnaie, directement ou indirectement, d’un emprunt et doit lui aussi rembourser le capital et les intérêts..si je comprends bien, la masse monaurales en circulation ne peut arithmétiquement pas rembourser la dette associée a la création de cette masse. Comment cela peut-il fonctionner sans qu’à un moment certains des acteurs soient mécaniquement en défaut ? Si tel est bien le cas, quel est l’intérêt au regard de la fonction de la monnaie qui est de permettre l’échange de biens et de services ? Merci par avance de votre éclairage.

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