Coût d’acheminement et fiscalité de l’électricité en France

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Une fois produite, l’électricité doit être commercialisé et livrée aux clients finaux avec cette particularité qu’elle ne peut pas être stockée.

Être disponible à moindre coût… et au bon moment

Le coût de production moyen est un indicateur théorique pour aider un industriel à choisir une technologie au moment de construire une nouvelle centrale électrique. Mais une fois en exploitation, l’électricité ne pouvant pas se stocker, la centrale doit pouvoir la délivrer à tout moment aux consommateurs finaux. L’offre doit ainsi continuellement s’adapter à la demande sous peine de provoquer un délestage, c’est-à-dire un arrêt de l’approvisionnement du réseau, pouvant provoquer un « black-out », c’est-à-dire une panne générale de courant.

Cet équilibre se réalise selon la règle du « merit order » c’est-à-dire que c’est d’abord l’électricité produite la moins chère qui est appelée en premier et ainsi de suite. Selon la période de la journée, les saisons, la météo, la demande va fluctuer. Il en sera de même pour le coût de génération de l’électricité pour chaque centrale.

Il est donc nécessaire de mixer les différentes énergies en fonction de leur intermittence (solaire, éolien) et de leur capacité à monter rapidement en puissance (gaz, charbon, centrale hydraulique avec réservoir) pour les compenser. D’autres sources d’énergie présentent l’avantage de générer de l’électricité de façon continue sans émettre de CO2 (hydraulique au file de l’eau, nucléaire) mais sans pouvoir être arrêtées ou plus lentement. Le mix de ces énergies va se réaliser par les échanges sur le marché de gros.

Le marché de gros

C’est le marché où se négocie l’électricité entre les professionnels du secteur. On y retrouve évidement le producteur d’électricité qui détient la centrale et qui va vendre son électricité aux fournisseurs d’électricité en charge de la commercialiser et garantir sa livraison aux clients finaux. Mais il y a aussi des négociants qui sont des intermédiaires, achetant pour revendre ou inversement et qui favorisent ainsi la liquidité. Ces échanges peuvent se réaliser directement de gré à gré, avec ou sans intermédiaire, mais aussi sur des bourses.

En Europe, ces bourses se sont développées à la faveur de la libéralisation du marché de l’électricité lancée par l’Union Européenne depuis 1996. Initialement nationales, ces plateformes d’échanges se sont progressivement rapprochées, pour peu que les interconnexions des réseaux électriques entre les pays permettent une livraison concrète de l’électricité. Ainsi, le français Powernext s’est associé à l’allemand EEX (European Energie Exchange) en 2008 pour créer l’European Power Exchange (EPEX) SPOT. Il gère depuis sa fusion avec le néerlandais APX en 2015, les transactions d’électricité au jour le jour (intraday) ou de la veille pour le lendemain (day-ahead)  pour la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse et l’Autriche. Les prix y sont naturellement très volatiles puisque les opérateurs y ont parfois recours pour pallier un imprévu.

Des bourses à terme avec des livraisons de l’électricité à plusieurs semaines, mois et même années coexistent à côté de ces marchés spot ou jour le jour. Elles permettent d’établir des prix de l’électricité plus stables sur lesquels les fournisseurs d’électricité peuvent s’appuyer pour établir leurs tarifs contractuels de vente avec leurs clients finaux. En Europe, l’European Energy Exchange (EEX) Power Derivates est la plateforme pour réaliser ces transactions en France et en Allemagne.

 

En France, l’ouverture pure et simple à la concurrence du marché de l’électricité a dû être rapidement remise en cause. En effet, jusqu’en juillet 2011, les concurrents d’EDF sur le marché français étaient contraints de se fournir très largement aux prix de marché, parfois très volatils et bien souvent plus couteux que le prix réglementé du parc de production nucléaire français dont les investissements initiaux étaient largement amortis. Dans ce contexte, il était difficile de gagner des parts de marché face à l’opérateur historique EDF.

Par la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) mise en place le 1er juillet 2011, le tarif réglementé n’est pas remis en cause mais EDF se doit de vendre jusqu’à un quart de l’électricité qu’elle produit dans ses centrales nucléaires à ses concurrents sur le marché français. Ce dispositif s’appelle l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH).

Le coût du réseau électrique

 Une fois l’électricité achetée et commercialisée, son acheminement doit être assuré par le réseau électrique qui est le maillage des fils électriques couvrant le territoire.

Il y a trois niveaux de réseau :

  • Le réseau de grand transport et d’interconnexion avec les pays frontaliers. Il s’agit de transporter de grandes quantités d’énergie avec peu de perte sur de longues distances. On parle aussi d’autoroute de l’énergie.
  • Les réseaux régionaux de répartition qui comme le nom l’indique répartissent l’électricité dans les régions pour alimenter les réseaux de distribution ou directement les gros industriels.
  • Les réseaux de distribution qui desservent les consommateurs finaux (entreprises et particuliers)

Le coût de transport recouvre les coûts des deux premiers réseaux qui sont des lignes de très haute et haute tension. Il est exploité par Réseau de Transport d’Électricité (RTE) qui en a le monopole.

Le coût de distribution relève du dernier réseau qui englobe les lignes de moyenne et basse tension c’est à dire les derniers kilomètres du réseau électrique. La gestion en est confiée à Enedis pour 95 % du réseau, la responsabilité des 5 % restant relevant des entreprises locales de distribution qui sont souvent des opérateurs historiques attachés à une municipalité, un département ou une zone rurale.

C’est la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) qui est en charge de la détermination du coût de ce réseau afin de calculer le TURPE qui est le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité. Il sera différent pour un industriel n’ayant recours qu’au réseau de transport (uniquement haute tension) et pour un particulier qui bénéficie de l’ensemble du réseau, distribution incluse (moyenne et basse tension). Il représente près de 30% de la facture électrique.

Ce tarif doit permettre aux gestionnaires de mener leur mission de service public selon un principe : l’accès au réseau doit se faire au même tarif quelle que soit la distance parcourue par l’électricité, quel que soit le territoire (principe de péréquation) et de manière à couvrir les coûts engagés par les gestionnaires de réseaux pour peu qu’ils soient raisonnables.

Fiscalité de l’électricité

S’ajoutent à ces coûts de production, de commercialisation et de livraison, trois contributions et taxes sur lesquels s’appliquera la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) :

  • La Contribution Tarifaire d’Acheminement (CTA) : elle finance le régime des retraites du personnel des secteurs régulés de l’industrie électrique et gazières. Depuis le 1er août 2021, elle représente 21,93 % de la partie fixe du tarif d’acheminement appliqué par les gestionnaires du réseau de distribution d’électricité.
  • La taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE), parfois encore désignée sous son ancien nom : la Contribution au Service Public d’Électricité (CPSE). Elle intègre depuis le 1er janvier 2022 une part départementale – la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité (TDCFE) – et comprendra également, à partir du 1er janvier 2023, une part communale – la taxe communale sur la consommation finale d’électricité.

Le taux de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) s’applique différemment selon les postes :

  • 5,5 % pour le montant de l’abonnement et sur la contribution tarifaire d’acheminement (CTA)
  • 20 % sur le montant même de la consommation d’électricité et sur la contribution aux charges de service public de l’électricité (CSPE) et la taxe sur la consommation finale de l’électricité (TCFE)